Alain DumasAlain Dumas – Économiste – Dossier Covid-19: Solidarité régionale – Avril 2020 

Pour lutter contre la pandémie du Covid-19 et la récession qu’elle entraîne, les gouvernements et les banques centrales ont annoncé des injections de plus de 10 000 milliards de dollars depuis quelques semaines. Si certains se demandent d’où viennent tous ces milliards, d’autres s’inquiètent du niveau d’endettement de nos gouvernements ? Ces injections sont-elles vraiment nécessaires ?

Compte tenu de l’ampleur de cette double crise, les gouvernements se doivent d’intervenir massivement afin d’éviter un effondrement de l’économie, c’est-à-dire la disparition définitive de plusieurs milliers d’entreprises et de plusieurs millions d’emplois. En d’autres termes, ne pas intervenir finirait par transformer la récession en dépression prolongée de l’économie, ce qui serait beaucoup plus coûteux que les injections actuelles.

Heureusement que nous disposons des enseignements prescrits par l’économiste John Maynard Keynes dans les années 1930, qui a démontré que seul l’État et sa banque centrale peut et doit intervenir dans l’intérêt général.

En effet, force est de constater que les marchés financiers témoignent d’un aveuglement remarquable en temps de crise. Parce que focalisés sur le profit à court terme, les acteurs financiers ont tendance à retirer leurs avoirs en période d’incertitude, provoquant un krach et un assèchement du système monétaire et par le fait même la paralysie des sources de financement de l’économie réelle. C’est pourquoi les banques centrales injectent des centaines de milliards de liquidités tout en réduisant leurs taux d’intérêt à des niveaux proches de zéro.

« Le marché n’a ni cerveau, ni cœur. » Paul Samuelson, Prix Nobel d’économie

Doit-on s’inquiéter de l’endettement du gouvernement ?

De leur côté, les gouvernements multiplient les programmes d’aide aux entreprises et aux travailleurs et travailleuses. Ainsi, le fédéral injectera 250 milliards $, un montant qu’il devra emprunter. C’est à se demander qui financera ces dépenses ? C’est précisément là qu’entre en jeu la Banque du Canada, qui fournit des liquidités au gouvernement en lui achetant des bons du Trésor à des taux d’intérêt presque nuls, ce qui réduit comme une peau de chagrin le coût d’emprunt du gouvernement.

Or, certains se demandent si la dette gouvernementale sera supportable ? Quand on se compare au niveau d’endettement qui prévalait à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, la situation actuelle est pour le moins favorable. Comme on peut le voir dans le tableau ci-contre, la dette du fédéral représentait 110 % de la production (PIB) du pays en 1946. Aujourd’hui, même avec l’ajout de 250 milliards $ au déficit budgétaire, la dette canadienne ne représentera que 46 % du PIB, soit une des plus faibles au monde. C’est donc dire que le gouvernement dispose d’une marge de manœuvre confortable pour faire face à la crise.

Tableau Dette nette et PIB

Années Dette nette PIB Dette / PIB
  (en milliards de dollars) (en %)
1946 13,4 12,2 110 %
2019 718 2303 31 %
2020 1035

(déficit prévu de 200 G$)

2236

 

46 %

Sources: Statistique Canada et budget fédéral.

Revoir notre système économique

Cependant, une fois la crise terminée, il faudra revoir entièrement les bases de notre système économique. Car, depuis toujours, le capitalisme est obnubilé par une course à la croissance économique à tout prix dont la finalité est la recherche du profit à court terme. Cette course a été alimentée par les politiques de libéralisation des 40 dernières années qui ont engendré des comportements qui vont à l’encontre de l’intérêt général.

D’une part, les gouvernements ont réduit la progressivité de l’impôt tout en adhérant à une mondialisation qui laisse libre cours aux stratégies d’évasion fiscale, dont le recours accru aux paradis fiscaux. D’autre part, plutôt que d’améliorer leur productivité, bon nombre de grandes entreprises ont distribué leurs profits à leurs actionnaires sous forme de généreux dividendes. Ces entreprises, qui se retrouvent avec des coffres vides en pleine crise économique, sollicitent aujourd’hui l’aide des gouvernements. Je ne parle pas ici des PME qui ne peuvent se permettre de tels comportements.

Le résultat de cette logique économique est troublant : crise écologique, explosion des inégalités et précarité de nos systèmes publics de santé et d’éducation.

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