Alain Dumas – mars 2020
Il y a bientôt un quart de siècle, l’Assemblée nationale du Québec votait la loi sur l’équité salariale. Le but de cette loi consistait à égaliser les salaires des emplois traditionnellement féminins avec ceux des emplois équivalents occupés par des hommes. Après autant d’années, où en est le Québec?
Si depuis 1997, l’écart salarial entre les hommes et les femmes a diminué, on est encore très loin de l’équité réelle. Selon l’Institut de la Statistique du Québec, les femmes gagnent toujours moins que les hommes; l’écart s’est même creusé en 2018. En effet, tant au niveau du salaire hebdomadaire que du salaire horaire, les femmes gagnent en moyenne 12 % de moins que les hommes. Cela signifie qu’une femme gagne 0,89 $ lorsqu’un homme gagne 1 dollar.
Seules les femmes syndiquées ont connu une amélioration importante; l’écart avec leurs collègues hommes étant passé de 7 % à 2 % depuis 1997. Il en est autrement pour les femmes non syndiquées, car l’écart salarial est de 15 % aujourd’hui. Dans les emplois au bas de l’échelle, l’écart oscille autour de 30 %.
Selon la Table de concertation du mouvement des femmes de la Mauricie, le revenu des femmes est 30 % inférieur à celui des hommes. Dans un contexte où le revenu médian de la région est un des plus faibles au Québec, on comprend mieux pourquoi le taux de pauvreté des femmes est 13 % plus élevé dans notre région.
Selon une étude qui compare les salaires des hommes et des femmes entre les différentes branches du secteur public (administration publique, universités, municipalités et entreprises publiques), on y constate que les femmes qui travaillent dans l’administration publique québécoise (fonction publique, santé et services sociaux, éducation) gagnent en moyenne 0,90 $ pour chaque dollar gagné par les hommes (IRIS : 2019[1]). Cet écart salarial au sein même de l’État québécois équivaut à plus de 7 milliards $ par année.
Une discrimination systémique
Puisque les écarts de salaires persistent pour des emplois parfaitement équivalents, force est de constater que la discrimination systémique demeure enracinée dans les mentalités. Comme le soulignait la Coalition en faveur de l’équité salariale[2], l’exercice prescrit par la loi ne change rien à la discrimination fondée sur le sexe, laquelle s’explique par les préjugés sociaux, la ségrégation professionnelle et les emplois typiquement féminins qui sont socialement et économiquement sous-valorisés.
La Loi sur l’équité salariale demeure donc insuffisante pour rétablir un rapport de force favorable aux femmes. Malgré les 23 ans de la Loi sur l’équité salariale, une proportion élevée d’entreprises ne se sont pas encore conformées à cette loi. C’est pourquoi une femme qui possède le même diplôme, la même expérience et un emploi équivalent a en moyenne un salaire inférieur de 10 % à celui d’un homme.
Sources:
[1] François Desrochers et Eve-Lyne Couturier, Inégalités de rémunération entre les hommes et les femmes au Québec : L’impact de la ségrégation professionnelle du secteur public, Institut de recherche socio-économique, Février 2019.
[2] Coalition en faveur de l’équité salariale, Mémoire déposée à la Commission de l’Économie et du Travail, Mai 2015, 17 pages.