Le jeune Émile Bilodeau, récemment repêché dans le volet « chanson » de la cuvée 2017 des Révélations de Radio-Canada, a eu la gentillesse de nous accorder une entrevue téléphonique. Après avoir eu quelques problèmes techniques, voilà qu’Émile m’appelle de son téléphone résidentiel, candide comme un bon ami et manifestement enthousiaste.
Je lui demande d’abord comment il a reçu la vague de succès qui l’a propulsé sur la scène québécoise après Cégeps en spectacle 2013 : « Le simple fait que mes salles soient pleines, c’est énorme pour moi. Je trouve ça fantastique de pouvoir toucher autant des jeunes que des moins jeunes. » Par ailleurs, il avoue gérer assez bien sa visibilité, car de se faire connaître du public avait toujours été un but pour lui, que ce soit grâce à sa guitare ou à ses talents d’improvisateur, autre passion d’Émile.
Ce qu’il apprécie du métier d’auteur-compositeur-interprète, c’est de pouvoir défier les attentes de son public. « Quand tu vas voir un show d’humour, tu t’attends à rire; quand tu vas voir une pièce de théâtre, tu t’attends à ce qu’on te raconte une histoire. Mais ce qui est particulier avec la musique, c’est que les textes peuvent être drôles, lyriques, littéraires… Si j’ai eu du succès, c’est parce que j’ai la capacité de surprendre les gens. » Lorsque l’on voit Émile sur scène, c’est effectivement un amalgame d’humour, de critique sociale, de cynisme, d’optimisme et d’anecdotes qu’il présente à travers sa musique et ses chansons.
Le choix d’assumer son accent québécois dans ses paroles n’a pas été difficile pour Bilodeau : ses idoles musicales, telles que Dédé Fortin, ont, selon lui, pavé le chemin pour qu’il puisse s’exprimer authentiquement. « Si j’ai eu la chance de faire ce métier-là, c’est parce que d’autres avant moi ont gardé l’essence de leur nationalité québécoise. Ce sont ces gens-là qui m’ont ouvert la porte. À une époque, oui, on était gênés de notre nationalité, de tout ce que notre accent amenait. On est plusieurs artistes maintenant à assumer notre langage. […] On est tous d’accord pour dire que la langue québécoise évolue, et si elle évolue, c’est parce qu’elle vit bien. »
En fait, cet artiste émergent est « tombé dans la marmite » de la chanson il y a déjà quelques années. Il nous confie qu’au début de son parcours, il a été entouré de musiciens plus âgés qui étaient choqués qu’un aussi jeune artiste se retrouve dans leur gang. « J’ai été victime de ma jeunesse, un peu. Lors de mon passage aux Échangistes, j’en parlais avec Pénélope McQuade, et Paul Piché était à mes côtés. Quand les artistes établis disent que la relève, c’est pas une relève idéale, c’est parce qu’ils sont dérangés par notre arrivée… Je me suis toujours juré que, si je réussis à avoir une carrière qui évolue comme je le souhaite, je supporterais toujours la relève. »
Et désormais, il pourra clouer le bec aux réfractaires puisqu’il peut se vanter de faire partie d’une certaine élite musicale grâce aux Révélations de Radio-Canada. Il a été choisi à l’aube de ses 20 ans, un honneur qui le laisse à la fois humble et reconnaissant.
Émile Bilodeau parle également de son premier et plus récent album, Rites de passage, qui évoque justement ce passage difficile dans le milieu en tant que « jeune » artiste qui peine à se faire respecter. Il rend hommage à la jeunesse, à sa société et à l’amour, des thèmes dans lesquels tous peuvent se reconnaître.
Émile sera de passage pour la première fois en Mauricie lors du FestiVoix, sur la scène des Voix libres. Ironie du sort, ce souverainiste dans l’âme et la guitare sera sur scène le 1er juillet, jour de la fête du Canada. Toutefois, il n’a pas l’intention d’ignorer cette occasion de prendre la parole. « C’est mon devoir de jouer dans le bobo ! », lance-t-il, espiègle.