Ariane Gélinas, codirectrice générale et littéraire et Karine Bouchard, codirectrice générale et artistique. Crédit photo : Anne-Sofie Bathalon
Le 22 septembre dernier, se tenait, à la Galerie d’art du Parc, le lancement ainsi que le vernissage de l’exposition temporaire Archiver le futur : re-documenter par la marge et le transitoire de la revue le Sabord. Ce périodique, publié tous les quatre mois, se distingue par son contenu unique. Il s’agit d’un mélange fluide et équilibré entre la littérature et les arts visuels. Justement, lors du lancement, l’équipe du Sabord fêtait les 40 années d’existence de la revue. On peut dire sans équivoque que l’exposition reflète parfaitement le titre de celle-ci, un magnifique mélange entre nostalgie, fierté et profondeur.
Le point de départ
La Gazette de la Mauricie a eu le privilège d’avoir une visite guidée avec les deux co-organisatrices avant le lancement officiel qui prenait la forme d’un 5 à 7. Durant celle-ci, la codirectrice générale et artistique, Karine Bouchard, explique qu’au départ, pour leur quarantième, elles ont voulu faire plus qu’une revue disons dimensionnelle, elles se sont alors dit qu’elles allaient installer la revue dans l’espace. « Comment fait-on pour se renouveler comme codirectrice avec cette revue qui a 40 ans, qui a été vue et revue par d’autres personnes? On s’est dit qu’on allait fouiller dans nos archives afin de pouvoir offrir quelque chose de nouveau.» Au même moment sa collègue, codirectrice générale et littéraire, Ariane Gélinas, nous montre les trois exemplaires des revues publiées en 2023. Elle ajoute « qu’elles se sont interrogées sur comment par-delà la publication des trois numéros anniversaire elles pouvaient encore plus célébrer la mission du Sabord qui est de mettre en valeur la littérature et les arts visuels. » Karine Bouchard conclut en affirmant « que l’exposition est le point culminant de ces trois numéros ».
L’exposition Archiver le futur
C’est au troisième étage de l’élégant manoir de Tonnancour (aujourd’hui Galerie d’art du Parc), construit en 1723, que se trouve l’exposition temporaire. Celle-ci se déroulera jusqu’au 22 octobre 2023. La sélection des artistes, Gabriel Mondor, Maude Pilon, Isabelle Gagné ainsi que Simon Brown, n’est pas le fruit du hasard. Karine Bouchard explique « que ce sont d’abord des gens qui travaillent les archives puis avec quelque chose de l’ordre de l’histoire orale, de la transmission. » Elles ont également sélectionné deux artistes bien établies, Isabelle Gagné, considérée comme instigatrice de la phonéographie au Canada, ainsi que Simon Brown, poète et traducteur. Les co-directrices ont également sélectionné des artistes de la relève, comme Maude Pilon, qui en est à son troisième livre publié ainsi que Gabriel Mondor récipiendaire du Prix Loto-Québec de l’artiste de la relève.
En lisant le titre de l’exposition, Archiver le futur, on peut être déstabilisé, il s’agit en effet d’un beau paradoxe. En fait, les artistes ont carrément créé de nouvelles œuvres à partir des archives du Sabord. Au travers de celles-ci, on sent le passé du Sabord. On entre dans une ambiance chaleureuse et immédiatement, on sait, qu’à travers les décennies, une foule de moments heureux se sont produits et que des relations puissantes en sont ressorties. On peut affirmer que les organisatrices ont atteint l’un de leurs objectifs, c’est-à-dire un espace d’échange entre les exposants ainsi qu’avec les visiteurs. Il est indéniable que les artistes étaient heureux de parler de leurs créations.
Étroites collaborations entre artistes
Les quatre artistes et auteurs étaient amenés à travailler en étroite collaboration. L’une des œuvres particulièrement touchantes était justement le duo Brown/Poulin sur un enregistrement audio. Ceux-ci ont fait des collages de textes de réponse de textes refusés. On peut entendre les voix des artistes récitant leurs textes ce qui nous donne un sentiment intense. Une autre œuvre particulièrement forte en émotions est celle du jeune Gabriel Mondor, avec ses arrangements métalliques en forme de foyer. Celui-ci a invité des personnes marquantes dans l’histoire du Sabord, à venir brûler des anciennes éditions. L’artiste a confié « que le fait de brûler ne veut en aucun cas détruire, mais plutôt transformer la matière». Il ajoute que des émotions fortes de la part de ces invités en sont ressorties. En s’approchant plus près des sculptures, on peut entendre des moments de leur conversation. Sans avoir été présents, on ressent très bien l’émotivité submergeante qu’ont pu ressentir certaines personnes. Finalement, l’exposition touche à plusieurs sens, que ce soit par les yeux, le toucher, ou l’ouïe. Cela rend l’expérience encore plus viscérale.