Crédit photo : Dominic Bérubé

La langue française a grandement évolué depuis que Jean Nicot a publié le premier dictionnaire, Le Thresor de la langue francoyse, en 1606. À cette époque, la féminisation des noms de métiers ne faisait pas débat. Au contraire, il allait de soi que l’utilisation de termes féminins était une nécessité. Cependant, l’Académie française allait bientôt brouiller les cartes. En effet, depuis sa création en 1635, cette institution s’est vivement opposée à cette féminisation de la langue, puis à l’écriture inclusive ainsi qu’aux projets de simplification de l’orthographe et de la grammaire. Ainsi, dès 1637, le grammairien Claude Favre de Vaugelas déclarait que « le genre masculin étant le plus noble, il doit prédominer toutes les fois que le masculin et le féminin se trouvent ensemble ». Dès lors, la langue française s’est masculinisée.

 

La disparition des termes inclusifs

Avant la création de l’Académie française, des termes comme autrice, philosophesse, poétesse et capitainesse étaient d’usage courant. Leur utilisation permettait de faire exister les femmes dans la société. Par contre, la masculinisation de la langue a conduit à l’effacement de nombreux termes féminins, à la marginalisation des femmes et à la réduction de leur visibilité dans les domaines intellectuels et professionnels. Ces suppressions linguistiques ont renforcé l’idée que certaines professions et certains domaines d’expertise étaient réservés aux hommes, ce qui a entravé la participation des femmes dans ces milieux. Cependant, des noms de métiers dits féminins, tels que cuisinière et ménagère, ont évidemment été conservés.

Pourquoi tant de haine ?

Certaines personnes s’opposent vigoureusement à l’utilisation de la communication inclusive. Leurs craintes sont en fait basées sur des mythes et un manque de connaissance sur le sujet. En effet, plusieurs croient à tort que le masculin dit générique est neutre. En fait, durant les 40 dernières années, plusieurs études ont clairement démontré que notre cerveau comporte un biais masculin. Les travaux de Pascal Gygax et son équipe ont aussi prouvé que les femmes sont moins portées à postuler pour des emplois dont l’offre est seulement rédigée au masculin dit générique.

On pourrait penser que la lutte pour la communication inclusive est futile et qu’elle nous éloigne des problèmes de sociétés plus urgents. La réalité est cependant plus nuancée. Il est attesté que les États qui utilisent des langues plus égalitaires se classent généralement mieux quant à l’indice mondial d’égalité de genre (Global Gender Gap) du Forum économique mondial. Plus concrètement, la langue influence la pensée et la cognition. Par conséquent, si on emploie seulement des noms de métiers au masculin, les personnes de la pluralité des genres et les femmes auront de la difficulté à croire qu’elles détiennent les compétences pour exercer ces métiers. Ainsi, si une fillette n’a jamais entendu le mot plombière, on peut parier qu’elle ne sera pas en mesure d’envisager cette possibilité de carrière.

Communication inclusive, épicène ou néologismes ?

Il existe plusieurs possibilités lorsqu’on décide de recourir à la communication inclusive. On peut évidemment utiliser les doublets complets ; par exemple, on parlera des lectrices et des lecteurs. On peut aussi employer les doublets abrégés comme dans cet exemple : les lecteur-trices. La forme épicène, c’est-à-dire la forme neutre, représente toutes les identités de genre ; alors, au lieu de mentionner les lectrices ou les lecteurs, on optera pour le lectorat

On voit aussi de plus en plus de néologismes, comme lecteurices. Vous vous dites peut-être qu’il est impossible d’utiliser ces mots puisqu’il ne figurent pas dans les dictionnaires. En fait, le rôle des lexicographes qui établissent les dictionnaires est de répertorier les mots qui sont en usage, et non d’en inventer. On doit donc utiliser ces nouveaux termes pour qu’ils soient par la suite consignés dans les ouvrages de référence. 

En définitive, la communication inclusive constitue bien plus qu’une question de mots. Elle fournit un moyen de reconnaître et de célébrer la diversité, de rectifier les décisions sexistes du passé et de créer un monde où l’équité et l’inclusion sont la norme. Réintroduire des termes comme autrice et philosophesse dans notre langage devient un acte symbolique qui affirme notre engagement envers un avenir où les personnes de la pluralité des genres et les femmes occupent la place qu’elles méritent dans tous les domaines de la société.

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