La prochaine élection québécoise aura lieu le 1er octobre 2018. Cependant, la campagne électorale est largement lancée, et cela, dans le sens le plus électoraliste du terme.
Tout a commencé avant Noël. Le gouvernement du Québec annonçait en effet que les contribuables de la classe moyenne bénéficieraient d’une réduction d’à peu près 278 $ de l’impôt sur leurs revenus de 2017.
Cette première annonce a été suivie d’un train d’autres mesures. Le ministre de l’Éducation nous a d’abord avisés qu’il procéderait à un allégement de la taxe scolaire facturée aux contribuables chaque année en juillet. Cette mesure coûtera 650 millions de dollars au trésor public ; en Mauricie, elle équivaut à une réduction moyenne de 75 $ par famille.
Ensuite ce fut le tour du ministre de l’Emploi, du Travail et de la Solidarité sociale, qui a fait l’annonce d’un investissement de trois milliards de dollars pour sortir 100 000 personnes de la pauvreté. Le point de presse à peine terminé, plus d’un observateur faisait remarquer que ce nouveau plan créait deux catégories de pauvres, soit ceux qui sont inaptes au travail et ceux qui ne le sont pas. Comme ce plan s’étale sur cinq ans, il est difficile de ne pas y lire une invitation à réélire le gouvernement en place pour en voir l’accomplissement. Puis, quelques jours plus tard, le ministre des Affaires municipales, de passage à Shawinigan, a présenté la stratégie gouvernementale de son ministère pour 2018-2022 : une somme de 600 millions sera accordée à la réalisation d’actions prioritaires reliées, pour ce qui est de la Mauricie, à 14 enjeux ciblés par un certain comité directeur. Coïncidence, ces 14 enjeux ressemblent étrangement à un copier‑coller de ce qui avait été proposé pour le plan quinquennal de développement régional par la Conférence régionale des élus, tout juste avant sa dissolution en 2015. À noter que, la même année, on coupait 300 millions dans le cadre du nouveau pacte fiscal visant les municipalités.
Enfin, on ne saurait passer sous silence les autres mesures contenues dans la mise à jour du ministre des Finances, notamment celles qui prévoient des centaines de millions de dollars en éducation et en aide à l’enfance, en santé mentale, en soins pour les aînés hébergés, en enseignement supérieur et en implantation de l’Internet à haute vitesse dans certaines régions du Québec.
Assez paradoxalement, le gouvernement déverse sa manne après trois années consacrées principalement à mettre en place un régime d’austérité budgétaire qui a surtout consisté à réduire radicalement les services publics tout en procédant au démantèlement de larges pans de l’appareil d’État. Parmi les dommages collatéraux de cette austérité, évoquons au passage l’augmentation de la tâche des enseignants et des travailleurs de la santé ainsi que le recours de plus en plus élevé au secteur privé pour compenser l’engorgement du système public. Sans trop forcer le trait, on pourrait croire que le gouvernement dépense aujourd’hui pour réparer les pots cassés plutôt que d’avoir investi au moment opportun dans les acquis afin de les consolider et de les développer.
Cela étant, on ne va pas se mettre à pleurer parce que le gouvernement redonne en partie les sommes qu’il a brutalement ponctionnées par ailleurs. Mais qu’il soit permis de se demander si le parti libéral gouverne en fonction des intérêts supérieurs du Québec ou bien en vue d’assurer sa réélection. Chose certaine, ce gouvernement sera jugé le 1er octobre prochain non seulement sur son bilan, mais aussi sur la façon dont il s’y prend pour regagner la confiance de la population. À nous d’en prendre acte.