Gabrielle Chénier – Comité de solidarité/Trois-Rivières – mars 2021

La militarisation policière, processus par lequel les organismes policiers augmentent leur arsenal d’armes et d’équipements, a commencé au lendemain des attaques terroristes du 11 septembre 2001. Dans les années qui ont suivi, les forces canadiennes ont amorcé un virage stratégique vers des tactiques et des pratiques qui font de plus en plus appel à des interventions militarisées, même dans le cadre d’activités policières routinières.

Plus de 15 milliards de dollars ont été consacrés aux services de police au Canada en 2017-2018, selon Statistique Canada. Les déploiements d’équipes d’intervention d’urgence (SWAT) — des unités spéciales d’armes et de tactiques — ont augmenté dans les grandes villes canadiennes et sont souvent plus élevés que ceux de la police publique américaine. En 1980, le nombre annuel moyen de déploiements des unités tactiques canadiennes était d’environ 60 par unité, tandis que ce nombre est désormais d’environ 1 300 par unité, soit une augmentation d’environ 2 100 % en 37 ans.

La culture policière tend à privilégier l’utilisation de la force et de tactiques violentes plutôt que le compromis, la médiation et la résolution pacifique des conflits.

Si les déploiements de type SWAT étaient limités aux situations nécessitant leur équipement et leurs compétences, comme les prises d’otages et les menaces terroristes, il y aurait peut-être moins de raisons de s’inquiéter. Ce n’est malheureusement pas la réalité des équipes d’intervention d’urgence canadiennes. La militarisation a été normalisée au sein des plus grands services de police du Canada et les équipes d’intervention d’urgence, qui étaient autrefois considérées comme une option de dernier recours pour les forces policières, sont maintenant utilisées dans les activités courantes de la police, telles que l’exécution de mandats d’arrestation, le contrôle de la circulation, la police communautaire et l’intervention en cas de crise de santé mentale et de troubles domestiques.

Le déploiement d’équipes d’intervention d’urgence – des unités spéciales d’armes et de tactiques – se banalise et la police y a de plus en plus recours pour ses activités courantes. Crédits Photo : Simon Villeneuve – Wikimedia Commons

Par conséquent, la culture policière tend à privilégier l’utilisation de la force et de tactiques violentes plutôt que le compromis, la médiation et la résolution pacifique des conflits. Cela renforce l’acceptation parmi le personnel policier de l’utilisation de tous les moyens de force disponibles lorsqu’il est confronté à des menaces – réelles ou perçues – au public, à la propriété privée et à sa propre sécurité.

En 2018, Radio-Canada a publié un rapport d’enquête décrit comme « la première base de données nationale de chaque personne décédée ou tuée au cours d’une intervention policière », qui a permis de documenter 461 rencontres policières mortelles au Canada entre 2000 et 2017, soit une moyenne de près de 26 personnes décédées par an. La brutalité policière est malheureusement une nouvelle réalité. Les conséquences de la militarisation sont disproportionnées pour les personnes souffrant de problèmes de santé mentale, les groupes minoritaires et ceux qui exercent leurs droits démocratiques associés à l’expression politique.

De plus, les services de police canadiens ont reçu des millions de dollars de sociétés pétrolières, de banques et de financiers. Par l’entremise de fondations charitables douteuses, des hélicoptères, des véhicules blindés et des technologies de surveillance sont ainsi discrètement financés.

Les militant.es contre la militarisation policière défendent qu’une approche plus adaptée pourrait être adoptée par les services policiers. Réorienter les sommes massives versées aux forces policières du pays pourrait aider à prévenir un plus grand nombre de décès liés aux interventions policières. La santé mentale est un élément essentiel à prendre en compte pour une réforme efficace, car de nombreux décès liés à la police au Canada ont mis en cause des problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Selon les militant-e-s, les fonds pourraient plutôt servir à accroître le soutien communautaire à la santé mentale et à créer un nouveau type de service d’urgence qui ferait appel à des expert.es formé.es pour répondre aux besoins de santé et aux besoins sociaux des personnes en crise psychologique.

Sources:

https://thetyee.ca/News/2020/08/24/Private-Firms-Pour-Millions-Militarizing-Police/

https://theconversation.com/rise-of-the-swat-team-routine-police-work-in-canada-is-now-militarized-90073

https://theconversation.com/militarization-has-fostered-a-policing-culture-that-sets-up-protesters-as-the-enemy-139727

https://atlantic.ctvnews.ca/canada-s-militarized-police-forces-face-defunding-and-de-tasking-experts-say-1.5026945

 

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