Il semble plus que jamais essentiel de prendre en compte les potentiels bouleversements de l’IA sur l’échiquier mondial, la démocratie et les conditions de vie des populations. Photo : Dominic Bérubé

Les développements récents en intelligence artificielle (IA) ont entraîné des avancées technologiques majeures dans divers domaines, allant de la médecine à l’automobile en passant par le secteur militaire.

Récemment, nous avons appris à connaître le potentiel des agents conversationnels comme ChatGPT ou encore celui des IA génératives comme Midjourney. À la fois fascinants et inquiétants, ces outils d’intelligence artificielle semblent ici pour rester et leur perfectionnement laisse présager de grands changements sociaux.

À ce sujet, l’IA soulève de réelles préoccupations quant à ses implications géopolitiques. Si bien que, selon le prestigieux think tank américain Brookings, « quiconque prendra la tête dans le domaine de l’intelligence artificielle d’ici 2030, dominera le monde jusqu’en 2100 ».

« Quiconque prendra la tête dans le domaine de l’intelligence artificielle d’ici 2030, dominera le monde jusqu’en 2100. »

– The Brookings Institution

Alors que les États cherchent à tirer parti de cette technologie, les risques que font peser l’IA sur les tensions internationales, l’accroissement des inégalités, la démocratie et les conditions de vie humaines en général sont telles qu’il est urgent d’encadrer au plus vite son développement débridé.

Une nouvelle course aux armements ?

Bien qu’à ses débuts, la course à l’IA a le potentiel de devenir une nouvelle course aux armements. Les puissances mondiales se lancent actuellement dans une compétition acharnée pour développer et acquérir une supériorité technologique en matière d’IA, alimentant ainsi les tensions géopolitiques.

Prenons le cas des relations sino-américaines où la course dans le domaine de l’IA a pris une ampleur sans précédent. Pour ces nations, assurer leur supériorité technologique revêt une importance cruciale, car il s’agit d’un domaine stratégique et essentiel pour la défense nationale de même que pour la suprématie économique et géopolitique. L’IA offre des avantages considérables en matière de collecte et de traitement des données, ainsi que dans le domaine de la cybersécurité. À leurs yeux, une supériorité dans ce domaine permettrait à leur pays de renforcer sa capacité d’anticipation et de réaction face aux menaces.

C’est pourquoi, comme le rapporte L’institut AI Now de l’Université de New York, les géants américains de l’industrie technologique n’hésitent pas à invoquer cette course à l’IA et la menace chinoise pour s’opposer aux tentatives de régulations des gouvernements en la matière. La course internationale à l’IA sert donc bien souvent de prétexte pour distribuer une technologie complètement débridée. Exit le principe de précaution. Nous assistons bel et bien, quelque soixante-dix ans plus tard, à une nouvelle course à l’armement aussi peu rationnelle qu’à l’époque du nucléaire.

Robots tueurs entièrement automatisés, drone sans commandement humain, logiciels pour optimiser les cyberattaques, rien pour rassurer dans un contexte géopolitique toujours plus tendu entre l’OTAN, la Russie, l’Iran ou la Chine.

L’IA comme outil de désinformation et de contrôle

Nous le savions déjà, l’IA offre des possibilités de surveillance et de contrôle sans précédent. Les gouvernements peuvent utiliser cette technologie pour surveiller leurs citoyens, réduire les libertés individuelles et restreindre l’accès à l’information. La presse internationale rapporte d’ailleurs depuis un moment déjà l’utilisation de la reconnaissance faciale par le Parti communiste chinois de Xi Jinping pour identifier les dissidents et faciliter la répression.

A-t-on déjà oublié les manipulations de masses commises par les firmes comme Cambridge Analytica ? Le scandale qui a éclaté en 2014 a su nous montrer qu’il était, déjà à l’époque, assez aisé d’influencer le vote des électeurs en utilisant les algorithmes pour présenter des informations biaisées qui renforcent les préjugés et les croyances existantes.

Là où les esprits s’emballent, c’est depuis l’arrivée et l’accessibilité des IA génératives comme Midjourney ou Stable Diffusion. Ces outils peuvent fournir, avec de simples commandes textuelles, des images ultra réalistes. La seule limite, l’imagination de l’humain derrière la commande.

Si nous nous sommes amusés dernièrement de voir un faux Pape François dans un grand manteau tendance, les risques de dérives, de manipulation de désinformation, eux, n’ont pas de quoi faire sourire. Avec l’arrivée prévue dès cette année de la production vidéo selon les mêmes méthodes, les deepfakes représentent un puissant outil de désinformation donnant un frisson dans le dos.

Selon l’expert québécois, Yoshua Bengio, l’intelligence artificielle a le potentiel de poser une menace existentielle pour l’être humain. Gouvernements, chercheurs et organisations internationales devront donc rapidement collaborer pour instaurer des normes éthiques et une réglementation limitative afin de minimiser les risques de dérive de cette puissante technologie.

– Charles Fontaine, collaborateur, Comité de solidarité de Trois-Rivières

 

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