Dans les années 60 à Trois-Rivières, on évitait le quartier Sainte-Cécile. Sa mauvaise réputation tenait-elle simplement à des ragots et à des rumeurs ou bien était-ce réellement un repaire de petits bandits où régnait la violence ? On était en plein cœur d’un quartier ouvrier typique de l’époque. On pouvait y croiser la pauvreté, parfois la misère, et ses habitants se débrouillaient avec les seuls moyens qu’ils connaissaient.
Si le quartier Sainte-Cécile d’aujourd’hui porte encore les marques de cette époque, il a aussi beaucoup changé. Durant les dernières décennies, l’attrait pour les quartiers populaires, où on trouvait des immeubles pour une bouchée de pain, a attiré de nombreux nouveaux propriétaires comptant les retaper.
Une forme de mixité sociale s’est installée. On trouve maintenant un équilibre entre les bâtiments rénovés, les maisons historiques préservées, les taudis quasi insalubres, les HLM et autres constructions raboutées au petit bonheur. Le quartier est plus calme, presque paisible.
Plus récemment, les projets de développement touristique et urbain de Trois-Rivières ont beaucoup changé le portrait de ce qui n’était il y a peu de temps encore qu’un terrain vague. Au confluent de la Saint-Maurice et du Saint-Laurent ont poussé un amphithéâtre, un technoparc, un musée et de nombreuses tours d’habitation. Ce quartier limitrophe du vieux Sainte-Cécile en est séparé, comme souvent dans les quartiers défavorisés, par la frontière symbolique de l’ancienne voie ferrée.
Si la voie ferrée représente une sorte de cicatrice, le dernier point de suture en est certainement cette fleur de macadam qui brille même la nuit, comme une sentinelle, et qui veille discrètement sur le quartier.
Mais depuis quelques années, les choses changent vite. Les rénovations se multiplient, les loyers augmentent et le quartier devient de moins en moins accessible aux gens à revenus modestes. Or, ces vieux quartiers ont toujours joué un rôle important : ils offrent un logement abordable à ceux qui en ont le plus besoin.
Quand ces endroits disparaissent ou deviennent trop chers, ce sont toujours les plus vulnérables qui en paient le prix. Et un quartier perd une partie de son âme quand il chasse ceux qui l’ont bâti. Sainte-Cécile, survivra-t-elle à l’embourgeoisement ?
L’œil du quartier
Il existe Sur Facebook un groupe dédié au quartier Sainte-Cécile. Certains membres ont partagé leurs témoignages de la vie qu’on y retrouve avec La Gazette.
« J’habite le quartier Ste-Cécile depuis 12 ans. Tout le monde se connaît dans notre ruelle (St-Paul/Ste-Cecile). Nous organisons un party de ruelle pour la St-Jean, Pâques, l’Halloween. Il y a bcp d’entraide. Nous avons un groupe facebook juste de notre petite ruelle, et les gens peuvent s’emprunter des choses, demander un service, etc. Le quartier est loin d’être parfait… mais j’adore la ruelle et mon voisinage! »
– Noémie
« À 20 ans, j’ai loué mon premier appartement dans Sainte-Cécile, à trois maisons d’où je vis aujourd’hui. À l’époque, c’était une décision purement financière : 150 $ par mois, chauffage inclus. C’était abordable et ça me convenait. Aujourd’hui, à 66 ans, j’habite toujours le quartier, dans une maison cette fois. J’aurais pu acheter ailleurs, dans un secteur plus résidentiel, mais j’ai choisi de rester ici. J’aime Sainte-Cécile. J’y ai mes amis, mes habitudes, et j’aime l’ambiance du quartier ».
– Jean
« J’ai fondé le groupe Facebook du quartier Sainte-Cécile en mai 2025, à la suite de la campagne pour la réfection du tunnel ferroviaire. J’avais alors constaté, en voyant la mobilisation dans le groupe du Quartier Saint-Sacrement, que notre quartier n’avait pas encore de lieu semblable. Comme Sainte-Cécile présente plusieurs défis, il me semblait essentiel d’avoir un espace pour communiquer entre nous, échanger et renforcer la solidarité. C’est un quartier chaleureux, avec beaucoup d’entraide et une belle mixité sociale. «
– Jean-François