Alors que le gouvernement Couillard ne cesse de répéter que nous n’avons plus les moyens d’offrir des services publics universels et que l’austérité est le passage obligatoire, des milliers d’entreprises et d’individus détournent des centaines de milliards $ vers les paradis fiscaux.
Un paradis fiscal est un territoire (« offshore ») qui permet à des individus et des entreprises de contourner les règles fiscales et financières de leur pays d’origine. Caractérisé par des taux d’imposition très faibles ou inexistants, le paradis fiscal facilite l’ouverture d’un compte ou d’une filiale dans le plus grand secret bancaire. C’est ce secret bancaire qui rend difficile le repérage des transactions financières faites à partir de ces paradis.
Des pertes fiscales considérables
Selon James Henry, ancien chef économiste du cabinet de consultants McKinsey, les montants cachés dans les paradis fiscaux atteignent 26 000 milliards $*.
Puisque ces sommes d’argent rapportent des profits et des revenus financiers cachés, donc pas imposés, cela entraîne des pertes fiscales importantes pour nos gouvernements. À l’échelle mondiale, les pertes fiscales atteignent 1 300 milliards $ (3 % du PIB des pays riches), ce qui représente 60 milliards $ pour le Canada et 10 milliards $ au Québec.
Si la moitié des capitaux financiers de la planète transitent par les 70 paradis fiscaux, les banques y jouent un rôle important, comme en témoignent les 75 filiales des 5 grandes banques canadiennes qui y sont établies.
Pour les individus, il suffit d’ouvrir un compte dans une filiale bancaire canadienne située dans un paradis fiscal, et d’y réaliser des revenus de placement cachés à l’impôt canadien ou québécois.
Pour les entreprises, la stratégie consiste à transférer des profits du siège social vers des filiales situées dans les paradis fiscaux afin de diminuer le montant de l’impôt à payer au Canada et au Québec. Pour ce faire, l’entreprise diminue ses revenus (et ses impôts) au Canada en vendant son produit à bas prix à une filiale dans un paradis fiscal, laquelle revend le même produit à un prix élevé au Canada ou ailleurs. C’est donc la filiale enregistrée dans le paradis fiscal qui réalise la majorité des profits de l’entreprise sans y payer d’impôt. C’est pour cette raison que la moitié du « commerce international » se fait entre des filiales d’une même entreprise situées dans les paradis fiscaux.
Combattre le recours aux paradis fiscaux
Pour lutter contre ce phénomène, nos gouvernements pourraient interdire aux banques canadiennes d’avoir des succursales dans les paradis fiscaux ou les forcer à divulguer le nom de leurs clients qui y détiennent un compte. Une deuxième mesure consisterait à forcer les entreprises à divulguer leurs revenus et leurs profits pays par pays, ce qui permettrait d’imposer ces revenus à leur juste valeur au Canada et au Québec. Cependant, nos gouvernements doivent aussi renforcer les mesures de détection des stratégies utilisées dans les paradis fiscaux en créant des départements spécifiques de dépistage des fraudeurs. Là-dessus, le Canada et le Québec sont à la traine.
Pour en savoir plus, vous pouvez visionner le film Le prix à payer, accessible sur Tout.tv
*James Henry, The price of offshore revisited, Tax Justice Network, July 2012L