Le Jour de la Terre a une fois de plus mis en lumière, le 22 avril dernier l’urgence d’agir pour l’avenir de notre planète.
Les changements climatiques et la protection de l’environnement sont d’ailleurs au cœur des recherches, études et réflexions réalisées par les plus grands scientifiques de la planète. On n’a qu’à penser au GIEC, aux COPs, Sommets de la Terre et autres cercles scientifiques qui sonnent l’alarme sur l’urgence d’agir. À plus petite échelle, les messages manquent toutefois d’écoute, d’engagement et de sentiment d’urgence.
Aucun doute : les problèmes climatiques et environnementaux sont liés à la croissance économique. D’où l’apparition de l’idée de la décroissance. Un concept qui a vu le jour dans les années 1970 (The limits to growth, 1972) et qui appelle à freiner, voire renverser, la course à la croissance. Elle se répand dans les années 2000, reprenant aujourd’hui de la vigueur (Les Affaires, avril 2024). Le professeur Abraham (HEC Montréal) la définit comme « […] un appel à stopper volontairement et collectivement la course à la croissance économique […] ». Objet de vigoureux débats, l’idée a ses farouches partisans mais aussi des adversaires coriaces. Pourtant, la décroissance, si elle peut être perçue comme un défi illusoire, n’en semble pas moins inévitable. Non pas que nous puissions nous attendre des grands acteurs de notre planète qu’ils l’imposent d’emblée, mais bien que tôt ou tard, si nous ne déployons pas de plan structuré et durable, l’inaction finira par nous rattraper et par provoquer une décroissance forcée.
Que ce soit pour contrer les changements climatiques ou protéger l’environnement, nombre de solutions ont été proposées au fil des dernières décennies et sont toujours d’actualité. Mais elles rencontrent une grande résistance chez les élites économiques qui tirent profit de l’immobilisme actuel, notamment les dirigeants et actionnaires liés à l’industrie fossile.
Sur le plan politique, il faut reconnaître que, contrairement aux promesses d’enrichissement et de croissance économique, la lutte aux changements climatiques et ce qu’elle exige de changements dans nos modes de vie actuels, demeure trop souvent dans l’angle mort des discours lors des campagnes électorales.
Face au défi de l’heure, certaines initiatives individuelles et locales peuvent se révéler prometteuses et doivent être, à ce titre, encouragées. Il faut saluer certains projets collectifs alternatifs en cours axés sur la décroissance, notamment sur le plan agricole et d’un certain pan de la vente au détail de produits alimentaires. Mais force est de constater que pour vaincre ce défi planétaire, ces initiatives et projets doivent s’inscrire dans le cadre d’un changement radical et à beaucoup plus grande échelle du mode économique actuel qui, pour le plus grand bénéfice des géants de l’économie et de leurs actionnaires, carbure à la surproduction et la surconsommation.
Résultat d’une démarche volontaire ou pas, la décroissance apparaît inéluctable puisque les phénomènes de surproduction et surconsommation conduisent inexorablement vers un cataclysme voire même un effondrement économique. Un sinistre scénario marqué par un environnement amoché et les changements climatiques aux conséquences à la fois dramatiques et ingérables tels des mortalités à grande échelle, une répartition des richesses toujours plus inéquitable, des déplacements massifs de populations et des réactions vives et extrêmes des sociétés ayant du mal à tirer leur épingle du jeu. Rien de très réjouissant !
Il est vrai que le contexte actuel ne rend pas les choses faciles. Le style de vie énergivore propre aux pays du Nord, les appétits de domination économique et militaire des grandes puissances, la répartition inéquitable de la richesse, rien de tout cela ne disparaîtra comme par enchantement.
Mais tout n’est pas joué. Le choix est encore devant nous : laisser aller les choses et subir de plein fouet les conséquences d’un chaos social et économique, ou s’attaquer dès maintenant au changement radical de la trajectoire économique actuelle.