Mariannick Mercure, mai 2015
La fluoration de l’eau potable consiste en l’ajout de fluor dans un réseau d’aqueduc, à des dosages généralement situés entre 0,5 et 1,0 mg/L, selon les juridictions. Elle vise à prévenir la carie dentaire et ses conséquences sur la santé.
Au Québec, l’absence d’une couverture universelle de soins dentaires a créé au fil des ans des disparités importantes, de telle sorte qu’aujourd’hui les moins nantis ont davantage de caries et de problèmes associés que les plus fortunés. Afin de corriger cette inéquité, certaines villes, dont Trois-Rivières, ont opté pour la fluoration de l’eau. Le procédé, instauré en 1960, a fonctionné jusqu’à ce qu’un bris d’équipement force son interruption en 2008.
C’est la dose qui fait le poison
Pour les autorités sanitaires internationales, nationales et locales, la fluoration de l’eau potable ne présente que des effets bénéfiques pour la santé en prévenant la carie dentaire. Elle est d’ailleurs recommandée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Santé Canada et la Direction nationale de santé publique (DSP) qui estiment que cela réduirait les écarts de santé entre les riches et les pauvres.
Considéré bénéfique pour la santé des dents à de faibles doses, le fluor est toutefois considéré comme toxique à dose élevée et devient l’ennemi à combattre pour l’OMS dans les pays moins développés, principalement en Inde et en Chine. C’est que certaines nappes d’eau y sont chargées en fluor présent naturellement dans l’environnement, jusqu’à des taux de 30 mg/L, rendant cette eau impropre à la consommation. Cette distinction entre la fluoration artificielle à des fins de santé dentaire et l’hyperfluoration naturelle est cruciale dans la compréhension du présent débat.
Des citoyens préoccupés
Pour les groupes militants anti-fluor, la perception est toute autre. Selon eux, même à faible dose, l’ajout de fluor aux eaux de consommation constitue un risque et devrait être banni au profit d’autres moyens favorisant la santé dentaire. Depuis l’arrêt de la fluoration à Trois-Rivières, les préoccupations de certains citoyens se sont fait de plus en plus entendre face à cette mesure. La Coalition trifluvienne pour une eau très saine (CTETS) a ainsi vu le jour en 2010 et le débat sur la fluoration de l’eau continue d’occuper un espace important depuis, tant dans les médias qu’au conseil de ville. En 2014, les conseillers votaient en faveur de la reprise de la fluoration, avec une mince majorité de 9 contre 7, démontrant bien la division des élus face à cette question, à l’image de celle de la population. Le débat est toutefois loin d’être terminé.
C’est pourquoi, ce mois-ci, la Gazette de la Mauricie s’est entretenue avec 2 porte-paroles d’organisations qui, bien qu’elles clament toutes deux vouloir la santé de la population, se situent dans des points de vue très différents, menant à des conclusions diamétralement opposées. Dans ce qui semble être devenu une guerre d’information, divers types d’arguments d’ordre économique, environnemental, et juridique ont déjà été soulevés. Le présent article traite des aspects qui nous ont semblé les plus controversés, soit les impacts sur la santé ainsi que l’acceptabilité sociale, avec un intérêt particulier aux sources citées par les deux parties, qui sont au coeur même du débat.