Jean-Yves Proulx, octobre 2015
En grande pompe, Steven Harper annonçait le 5 octobre dernier la conclusion des négociations sur le Partenariat transpacifique, « le plus important accord de libre-échange de l’histoire, 12 pays comptant près de 800 millions de clients. ».
Pourtant en avril 2014, le comité éditorial du New York Times sonnait l’alarme : le secret de ces négociations ne s’applique qu’au public, les grandes entreprises, elles, jouent un rôle prépondérant dans l’élaboration de la position gouvernementale. Nos élus n’ont pas droit au chapitre !
Pour Paul Krugman, prix Nobel d’économie et chroniqueur économique au New York Times, aucun doute : « This Is Not A Trade Agreement » (le Partenariat transpacifique n’est pas un accord commercial). Il ne s’agit pas de diminuer les barrières aux échanges, mais de discuter de règles de droit de propriété et, surtout, d’instituer des mécanismes de règlement des différends. Or, pour Krugman, « les principaux bénéficiaires seront sans doute les entreprises pharmaceutiques et les grandes firmes qui voudront poursuivre les gouvernements… » Voilà les questions qui doivent être débattues !
Joseph Stiglitz, autre prix Nobel d’économie, abonde dans le même sens : « ne nous trompons pas : il est évident que le TPP ne concerne pas le “libre” échange… il y a là un problème fondamental, car certaines dispositions du TPP empêchent les États de remplir efficacement leurs obligations fondamentales : protéger la santé et assurer la sécurité de leurs citoyens, veiller à la stabilité économique et protéger l’environnement. » Le titre de sa réflexion parle de lui-même : Le Partenariat transpacifique contre le libre-échange.
Dans le Monde diplomatique, Benoît Bréville & Martine Bulard comparent ces « partenariats » à des tribunaux pour détrousser les États en rappelant entre autres exemples qu’en 2009, le groupe suédois Vattenfall dépose plainte contre Berlin, lui réclamant 1,4 milliard d’euros au motif que les nouvelles exigences environnementales des autorités de Hambourg rendent son projet de centrale au charbon « antiéconomique ».
Et Stiglitz de conclure « C’est ce qui arrive lorsque le processus de décision politique est entre les mains des seuls milieux d’affaires – sans que les élus du peuple aient leur mot à dire. »
Il y aurait donc d’autres raisons de s’opposer à cette « entente » que la protection de la gestion de l’offre pour nos producteurs laitiers ?
Sommes-nous bien informés ? Vivons-nous encore en démocratie ?