C’est en voyant défiler sur les réseaux sociaux toutes sortes de messages sur des « nuisibles » que j’ai eu envie d’aller voir par moi-même. En automne, les gens se plaignent souvent d’avoir des écureuils, des ratons ou d’autres petits visiteurs sur leur terrain. Par curiosité et un peu par instinct, je me suis rendu au Refuge Blanche-Neige, un centre de réhabilitation pour animaux de la petite faune situé entre Mont-Carmel et Shawinigan-Sud. Sur place, Virginie Duquette, fondatrice du refuge et ancienne infirmière, m’a accueilli au Domaine de la Forêt Perdue, où elle vient tout juste de relocaliser ses activités.
Avant même que je sorte mon micro, Virginie me propose de marcher un peu. « On va aller dehors, je vais te montrer les enclos », me dit-elle en enfilant ses bottes. On longe les sentiers bordés d’arbres, entre le cri des mésanges et le bruissement du vent dans les feuilles. C’est là, en marchant côte à côte, qu’on commence à discuter du refuge, de sa mission.
Pouvez-vous me dire où on est exactement et comment s’est faite cette collaboration avec le Domaine ?
« On est maintenant installé-es au Domaine enchanteur, aussi connu comme la Forêt Perdue. C’est un endroit agrotouristique, et depuis trois semaines on collabore avec le propriétaire, qui nous a approché-es pendant qu’on cherchait un nouveau lieu pour le refuge. On s’est dit qu’on allait joindre l’utile à l’agréable : je m’occupe des animaux sur place, et en même temps, les gens qui viennent peuvent profiter d’un parc animalier plus grand, accessible été comme hiver. »
Et concrètement, qu’est-ce que vous faites ici au Refuge ?
« On continue comme avant : on s’occupe des urgences, des bébés, des animaux blessés – tout ce qui touche la faune. On crée aussi des habitats, on fait les tournées du matin, on nourrit tout ce beau monde, et on s’assure que tout est beau autant pour les animaux que pour les visiteurs et visiteuses. »
Quel genre d’animaux accueillez-vous ?
« On ne reçoit pas d’insectes, je les déteste ! [rire] Mais sinon, on va de la petite souris au renard, en passant par le raton laveur et même le chevreuil. On a aussi une mini-ferme éducative avec des animaux de ferme rescapés : certains ont des handicaps, d’autres des particularités spéciales. Ici, chaque animal a une deuxième chance, dans un milieu de paix où il peut finir ses jours. »
Votre mission première, c’est donc la réhabilitation ?
« Toujours. Tant qu’on n’a pas la certitude qu’un animal ne peut pas retourner dans la nature, on met tout en œuvre : physiothérapie, médication, hydrothérapie, massothérapie… On adapte les milieux pour favoriser le retour à la vie sauvage. On a environ 90 % de réussite dans nos remises en liberté. Les 10 % restants, ce sont des cas où on doit garder l’animal en permanence ou, malheureusement, procéder à une euthanasie. »
Qu’est-ce qui vous passionne le plus dans ce que vous faites ?
« J’ai été infirmière pendant 10 ans. J’ai toujours aimé l’urgence, l’action. Alors, ici, quand on reçoit un animal blessé, c’est mon élément. Mais mon plus grand bonheur, c’est les moments de remise en liberté : voir un animal repartir libre après des semaines de soins, c’est le plus beau cadeau. Les gens me demandent souvent si ça me rend triste de les relâcher, mais, au contraire, c’est un accomplissement. Et puis, j’avoue, j’ai un faible pour les écureuils. C’est mon petit péché mignon. »
À l’automne, les gens disent souvent qu’il y a plus d’animaux sur leur terrain. C’est vrai ?
« Pas vraiment. Ce n’est pas qu’il y en a plus, c’est qu’ils sont plus actifs ! Eux aussi se préparent pour l’hiver. Ils font leurs réserves, ramassent des branches, comme nous on fait nos cannages et nos dernières corvées avant la neige. Le problème, c’est notre perception : on les voit bouger davantage et on pense qu’ils nous envahissent. Alors qu’ils font juste survivre. »
Et quels conseils donneriez-vous aux gens qui trouvent des animaux près de chez eux ?
« Avant de paniquer ou de sortir les pièges, informez-vous. Écrivez-nous, appelez un refuge, il y a toujours des solutions. Parfois, c’est juste une question de patience : attendre quelques semaines avant d’abattre un arbre, par exemple, le temps que les bébés quittent le nid. On peut aussi utiliser des répulsifs naturels ou bloquer temporairement des accès. Chaque situation est unique, alors on essaie toujours de trouver la solution la plus éthique. »
Si vous aviez un souhait, un rêve pour les prochaines années du refuge ?
« Qu’on apprenne à cohabiter. On veut aller dans les écoles, les maisons des jeunes, les entreprises, pour sensibiliser les gens à la faune. Arrêtons de dire que les animaux sont là pour nous nuire. Ils ne font pas ça pour “nous faire suer” : ils vivent, tout simplement. Si on leur laisse un peu de place, ils vont nous prouver qu’ils sont bien plus que des nuisibles. Ce n’est pas un rêve impossible : on va faire des petits miracles, un animal à la fois. »
Le Refuge Blanche-Neige, fondé par Virginie Duquette, se consacre à la réhabilitation, à la convalescence et à la protection des animaux de la petite faune. Le refuge est situé au 1180, rang Saint-Félix Est, Notre-Dame-du Mont-Carmel.
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Photo : David Leblanc / © La Gazette de la Mauricie et des environs












