Aujourd’hui, j’ai décidé d’aller voir de mes propres yeux une entreprise qui m’inspire depuis un bon moment : Uni-Recycle. J’en avais entendu parler comme une alternative sérieuse pour se débarrasser d’appareils électroniques de façon responsable. Parce que, soyons honnêtes, le recyclage, surtout dans le domaine des électroniques, c’est un univers rempli de zones grises. Trop souvent, on croit bien faire en déposant notre vieux cellulaire ou notre ordinateur hors d’usage dans un centre de recyclage, pour finalement apprendre que tout ça a fini… dans un site d’enfouissement. D’autres entreprises prétendent recycler ces appareils, mais en réalité elles se contentent de les trier rapidement avant de les expédier à l’étranger, sans réel souci de l’environnement.
C’est justement pour éviter ces pièges que j’ai voulu en savoir plus sur Uni-Recycle. Avant de me rendre sur place, j’avais déjà échangé avec Ludivine Dionnet, la responsable communication et marketing, qui m’avait bien décrit l’entreprise, son engagement et sa transparence dans ses processus. Et ce que j’ai entendu m’a convaincu que cette boîte faisait les choses autrement, pour de vrai.
Alors me voici arrivé devant leurs installations. À peine le temps de me stationner que Philippe Gignac, président-directeur général, vient à ma rencontre avec un sourire franc. On s’est donné rendez-vous pour une entrevue, et en voyant l’énergie qu’il dégage, je sais déjà que la discussion va être passionnante. Une chose est sûre : ici, on ne fait pas juste parler d’environnement, on agit.
En marchant à travers l’entrepôt, je constate l’ampleur du travail : des dizaines d’employé-es, affairé-es comme des fourmis, s’activent à trier, à démonter et à classer une quantité impressionnante de pièces d’appareils électroniques. Il y en a qui manipulent des ordinateurs, d’autres s’occupent des fils, des batteries, des circuits imprimés, chaque pièce étant soigneusement évaluée pour être réutilisée ou recyclée de la meilleure façon possible.
L’énergie qui se dégage de l’endroit est impressionnante. Ici, pas de chaos, tout est structuré, précis, efficace. Philippe me désigne différentes sections, m’explique brièvement le processus, mais rapidement, on décide de s’installer dans un coin plus calme, à l’intérieur de l’entrepôt, pour commencer notre discussion.
Une fois assis, il prend une grande inspiration, me regarde avec un sourire et me lance :
« Bon, par où tu veux commencer ? »
Qu’est-ce qui t’a poussé à te lancer là-dedans ? Y a-t-il eu un moment précis où tu t’es dit « OK, là, faut que ça change » ?
Dans le fond, Uni-Recycle est né du fait que je bossais dans une entreprise qui devait se débarrasser de ses électroniques, mais le service qu’on offrait était tellement compliqué que ça donnait quasiment le goût de tout envoyer aux vidanges. Ce n’était pas efficace pantoute. Avec mon associé de l’époque, on s’est demandé comment on pourrait faire mieux, et la réponse était évidente. On a donc décidé de se lancer et de développer notre propre service. C’est comme ça qu’Uni-Recycle a vu le jour, avec l’objectif d’offrir un service de collecte gratuite pour toutes les entreprises du Québec.
Comment l’entreprise a-t-elle évolué depuis ses débuts ?
Au début, on avait 1 000 fois moins de stock, mais aussi 1 000 fois moins d’espace. On a commencé avec juste des petits conteneurs maritimes à Champlain, sans électricité, juste avec la volonté de faire un changement en matière d’environnement. Mais rapidement, on a dû se trouver un premier entrepôt, qui était à l’époque juste une petite partie de l’espace où on est aujourd’hui. Puis, au fil du temps, on a continué d’agrandir, encore et encore, jusqu’à atteindre un total de 27 000 pieds carrés aujourd’hui.
Qu’est-ce qui t’a poussé à devenir entrepreneur dans le domaine de l’environnement ?
Ce qui m’a vraiment donné le goût de me lancer, c’était de constater en vrai l’ampleur du problème. Ce n’était pas juste une question de bonne volonté, mais de trouver une façon de bien faire les choses, en tant qu’entreprise réellement engagée dans l’environnement. Je n’osais même pas imaginer ce que faisaient, à l’époque, les entreprises qui n’avaient aucune valeur écologique avec leur matériel électronique. Pour nous, c’était une manière de contribuer, de faire notre devoir de citoyens. Puis, avec la croissance de l’entreprise, tout a pris une ampleur bien plus grande. Mais à la base, l’objectif, c’était simplement d’aider les autres à mieux gérer leurs déchets électroniques, parce qu’on avait nous-mêmes vécu à quel point c’était compliqué.
Te souviens-tu de ton premier client ?
Oui, bonne question ! Je me rappelle bien nos premiers clients. L’un d’eux, c’était Kruger, juste en face. On a aussi travaillé avec un centre de services scolaire à Montréal, et j’ai une anecdote à te raconter qui a été marquante parce que c’est le fait de travailler avec ce client qui a provoqué notre premier gros changement. À l’époque, on fonctionnait avec un simple conteneur maritime, mais ce client-là avait pratiquement autant de matériel que ce qui pouvait entrer dans notre conteneur. On s’est vite rendu compte qu’il nous fallait un entrepôt pour pouvoir gérer tout ça. C’est donc à ce moment-là qu’on a pris la décision de louer un espace plus grand, ce qui nous a permis de vraiment lancer l’entreprise à une autre échelle.
Quels sont les principaux défis auxquels Uni-Recycle doit faire face aujourd’hui ?
Les plus grands défis d’Uni-Recycle sont surtout d’ordre législatif, et ce, dans plusieurs branches. On a la capacité de servir encore plus d’entreprises qu’on le fait actuellement, mais certaines réglementations nous imposent des restrictions qui freinent un peu notre croissance. Cela dit, ces ajustements nous permettent aussi de mieux nous aligner pour repartir encore plus forts par la suite. En ce moment, notre principal enjeu tourne donc autour de ces cadres législatifs avec lesquels on doit composer.
Quel est ton plus grand rêve pour l’avenir d’Uni-Recycle ?
Si j’avais un rêve pour Uni-Recycle, ce serait qu’on puisse étendre notre présence partout dans le monde. Le service qu’on offre a su trouver sa place au Québec, et je suis convaincu que les raisons qui nous ont permis de nous implanter ici sont tout aussi valables ailleurs. J’aimerais aussi qu’on puisse influencer notre industrie pour qu’elle évolue vers une meilleure gestion du matériel électronique. En ce moment, on laisse énormément de matériaux inutilisés alors qu’ils pourraient encore servir. Malheureusement, le modèle actuel favorise davantage le recyclage que le réemploi, et c’est quelque chose que j’aimerais voir changer.
Quels types d’objets acceptez-vous chez Uni-Recycle ?
En gros, tout ce qui contient une batterie, un fil ou un circuit électronique peut être recyclé chez nous, à condition que ce ne soit pas de gros électroménagers difficiles à déplacer. On parle ici de petits appareils électroniques du quotidien. C’est justement ce qui fait la force de notre entreprise : on essaie d’avoir le moins de restrictions possible pour que les gens puissent se débarrasser de leur matériel facilement. On ne va pas refuser un objet ou imposer des frais inutiles. Notre mission, c’est de recycler un maximum de produits et, quand ce n’est pas possible, de les rediriger vers les bonnes ressources.
Y a-t-il des objets que vous préférez ne pas recycler chez Uni-Recycle ?
Officiellement, on recycle le plus de choses possible, mais s’il y a bien des objets qu’on éviterait volontiers, ce seraient probablement… les jouets sexuels. Imagine la réaction des employé-es au triage qui tombent là-dessus et se demandent, un peu perplexes : « Bon… on envoie ça dans quel département, exactement ? » Disons que ça nous sort légèrement de notre zone de confort !
À part ça, il y a aussi certains types de déchets qu’on ne peut pas prendre en charge, comme les produits dangereux ou les emballages non recyclables. Notre spécialité, c’est vraiment l’électronique. Avec toutes les choses ce qui n’entrent pas dans ce cadre, on fait notre possible pour les rediriger vers des organismes gouvernementaux ou des entreprises privées mieux équipées pour les traiter.
Quels sont les projets d’Uni-Recycle pour l’avenir ?
Oui, on en a plusieurs ! Dans les prochaines semaines, on va réaménager notre espace pour améliorer notre efficacité. Mais le gros projet à venir, c’est la construction d’un tout nouveau bâtiment. On vient tout juste d’acheter un terrain, et d’ici deux ans, on va y bâtir un édifice de 45 000 pieds carrés. Ce sera une belle avancée pour nous et pour la région !
Qu’est-ce que vous aimeriez voir changer dans le cadre législatif du recyclage ?
Ce que j’aimerais vraiment, c’est qu’on arrête de voir une compétition entre les gens qui veulent bien faire. Il y a tellement de matières recyclables qui finissent encore à la poubelle qu’on devrait plutôt unir nos forces au lieu de nous battre pour savoir qui fait ça le mieux. Si on travaillait ensemble plutôt que de tirer chacun de notre côté, on avancerait beaucoup plus vite. En ce moment, on perd du temps avec cette mentalité, et au final ce n’est pas comme ça qu’on fait réellement bouger les choses.
Alors que la conversation touche à sa fin, Philippe me regarde avec un sourire satisfait, conscient que chaque mot qu’il m’a dit venait du cœur. Son engagement envers le recyclage et l’environnement n’a rien d’un simple discours d’affaires ; c’est une véritable mission, un combat quotidien pour faire mieux, pour repousser les limites et pour changer les mentalités.
En partant, je ressens cette passion qui l’habite encore, malgré les défis, malgré les obstacles, malgré tout. Son regard brille d’une fierté sincère, celle d’un entrepreneur qui sait qu’il contribue réellement à quelque chose de plus grand.
Il m’accompagne jusqu’à la porte, me lance un dernier salut de la main et me dit en riant : « Si jamais t’as un vieux cell qui traîne, tu sais où aller le porter ! »
Je le remercie pour son temps, pour son honnêteté, et alors que je m’éloigne, je repense à tout ce qu’il a partagé avec moi. Derrière Uni-Recycle, il y a plus qu’une entreprise; il y a une vision, une volonté de faire un vrai changement. Et ça, ça ne se recycle pas.