Pour paraphraser Pierre Falardeau, non, le courage, comme la liberté, n’est pas une marque de commerce. Le courage, puisqu’il faut le rappeler, est une disposition du cœur qui permet d’entreprendre des choses difficiles en surmontant ses peurs. À l’évidence, par les temps qui courent, ce n’est pas ce que l’on entend dans la bouche des politiciens qui nous rapproche de cette vertu.
C’est à qui, à coups de discours lénifiants, en dira le moins pour ne pas effrayer l’électeur. Les uns et les autres rivalisent d’astuces pour le flatter dans le sens du poil avec les promesses de création d’emplois, la baisse des impôts, la déréglementation à tout crin et la parade des infrastructures. Paradis fiscaux, redevances minières, tuyauterie bitumineuse, anglicisation au galop, Rona, Alcan, Provigo et tutti quanti… On n’y peut rien. Pourquoi voter pour vous alors si on n’y peut rien ? C’est assurément ce que doivent se dire les milliers de citoyens qui, d’une élection à l’autre, boudent les urnes…
Mais en politique comme ailleurs, tout n’est jamais donné une fois pour toutes. L’actualité nous réserve parfois d’agréables surprises. C’est en tout cas ce que nous révèle aux États-Unis l’étonnant Bernie Sanders. Un septuagénaire qui a des airs de jeune premier. En plein cœur du capitalisme mondial, ce type ne se cache pas dans une garde-robe pour murmurer le mot socialisme. Chaque fois que l’occasion se présente, il se proclame haut et fort adepte de cette école de pensée. Il dénonce courageusement les grandes corporations, l’establishment corrompu, les inégalités, l’injustice et le ronron des politiciens de carrière. Il fallait l’entendre l’autre jour déculotter Alan Greenspan, l’ancien patron de la réserve fédérale, à propos de ses politiques délétères pour l’économie américaine… Et voilà que Bernie Sanders est en passe de rameuter la plus belle machine électorale qui soit. Voilà surtout que ce fier socialiste redonne le goût de la politique à des millions de jeunes. À telle enseigne qu’il talonne Hilary Clinton pour l’investiture du parti démocrate.
Méchant contraste avec ce qui se passe ici où le socialisme sert plutôt d’épouvantail à moineaux. Dernièrement, un bel exemple de pusillanimité nous aura été donné par Thomas Mulcair, lui qui s’est évertué à faire disparaître ce mot du vocabulaire du NPD pour le remplacer par équilibre budgétaire. Il ne se doutait sûrement pas que, ce faisant, il positionnerait ses troupes à la droite de Justin Trudeau et assoirait ainsi ses députés sur les dernières banquettes de l’opposition.
Comme le mot socialiste, il y a au Québec un autre mot qui a la vie dure. Un mot que ceux qui s’en réclament n’ont pas souvent le courage de prononcer, ne serait-ce que du bout des lèvres. Un mot que les adeptes du statu quo utilisent vicieusement pour effrayer l’opinion publique. Il était donc salutaire d’entendre les membres de l’Option nationale redonner à ce mot tout son éclat lors de leur congrès de janvier dernier. Enfin des souverainistes pour qui le mot indépendance n’est pas tabou ! Et si en effet, en le ramenant à l’avant-scène, à force d’éducation populaire et de débats publics, le mot indépendance retrouvait ses effets tonifiants ? Chose certaine, il est beau de voir aller les jeunes militants de l’Option nationale. Leur courage ne peut qu’inspirer les autres partis souverainistes. Leur action a par ailleurs le grand mérite de ne pas laisser toute la place aux Bonhommes sept heures qui s’époumonent continuellement à décrier le projet d’indépendance nationale. Enfin, leur détermination ne peut que redonner le goût de l’engagement à des milliers d’électeurs qui ne confondent pas une barre de chocolat avec un projet de société.