Il vaut la peine de souligner la coïncidence : 50 ans jour pour jour après les événements de mai ‘68 en France, l’UQTR a décrété un lock-out de ses professeurs. Voilà deux cas de figure dont les finalités, pour dire le moins, s’entrechoquent allègrement.
Pour mémoire, rappelons que le mouvement étudiant et le milieu universitaire en particulier ont constitué à l’époque la tête de pont de manifestations invitant à la prise de parole, aux discussions, aux débats lors d’assemblées générales ou de réunions informelles dans la rue et au sein de toutes les instances de la société française. On ne se disputera pas sur les retombées de mai ‘68, mais il y a eu là un élan collectif d’où ont surgi des idées et points de vue certainement liés à des avancées significatives au plan de l’intelligence citoyenne. Exactement ce à l’encontre de quoi s’est dressé le lock-out de l’UQTR. Un dispositif brutal de verrouillage et de cadenassage dégainé sans prévenir; une provocation inutile et une fin de non-recevoir à toute discussion.
Les médias ont fait largement état des conséquences désastreuses du lock-out pour l’université, pour la ville et pour la région.
Au-delà du sentiment d’indignation générale que ce geste a généré, une chose cependant est claire. Les administrateurs de l’UQTR et le recteur, aussi mal avisés soient-ils, se sont retrouvés avec un couteau sur la gorge. N’oublions pas que ce sont les politiques d’austérité gouvernementales qui les ont incités au pire. Il n’y a donc aucun déshonneur à ce que ceux qui ont décrété le lock-out y mettent fin au plus tôt. Ainsi pourra reprendre le dialogue sur les bases d’une solidarité inédite au sein de la communauté universitaire. Et sur cette lancée, ce n’est pas sur la voie d’un plan de redressement aveugle, d’une augmentation de la charge de cours et d’une précarisation de la recherche qu’on pourra s’engager. Il s’agira plutôt de mettre la table pour une mobilisation d’ensemble afin d’exiger de la part des autorités gouvernementales les moyens nécessaires à l’accomplissement d’une mission universitaire digne de ce nom.
À l’approche des élections du premier octobre, cet épisode nous fait voir en même temps à quel point il est important de soustraire l’action gouvernementale aux manœuvres qui consistent à compresser les grandes missions de l’État que sont la santé et l’éducation, cela pour se constituer une cagnotte en vue de saupoudrer les largesses en fin de mandat.
Rien n’arrive pour rien dit le proverbe. Chose certaine, un tel couac nous fait prendre conscience à quel point les affaires de la cité nous concernent tous. Oui, le rayonnement de notre université est inhérent à la qualité de notre implication citoyenne et à la vitalité de notre engagement politique. Quand on sait ça, c’est surprenant tout ce que l’on peut réussir !