Stéphanie Dufresne – Environnement – 19 novembre 2021
Le groupe veut unir les forces écologistes de Trois-Rivières et des environs.
C’est dans une ambiance de retrouvailles, qu’une trentaine de citoyen.ne.s et de militant.e.s des milieux environnementaux et communautaires a tenu vendredi matin le premier événement public du regroupement «Terre précieuse — coalition citoyenne pour l’environnement. »
« Le but est de réunir toutes les forces écologistes et progressistes de la Ville de Trois-Rivières et des environs pour créer une synergie, explique Charles Fontaine, co-porte-parole de la coalition. Il y a des personnes préoccupées partout en Mauricie, on veut soutenir les gens qui veulent défendre des enjeux qui vont dans le sens de l’environnement et de la justice climatique et sociale. »
Certain.e.s des citoyennes et citoyens présent.e.s s’impliquent déjà dans différentes causes. « Ce que l’on veut, espère Mariannick Mercure, ancienne conseillère municipale, c’est de se donner un réseau qui va mobiliser les citoyens et renforcer les différents mouvements environnementaux dans la région. »
La destruction « injustifiable » d’un milieu naturel
Comme première action, les membres de la coalition citoyenne demandent à la Ville de Trois-Rivières d’annuler le projet de drainage des milieux humides se situant près du parc industriel Carrefour 40-55, au nord-ouest de la ville.
Le projet de développement industriel détruirait 26 hectares de forêts et de marécages.

Une nouvelle coalition de citoyens demande à la Ville de Trois-Rivières de reculer sur son projet de développement industriel dans un milieu humide. Photo : Dominic Bérubé.
Jacques Rousseau, avocat à la retraite, révèle que la Ville veut se prévaloir d’une autorisation émise en 2014 pour détruire ce milieu humide. Or, depuis l’émission du certificat d’autorisation, la Loi sur la qualité de l’environnement a été modifiée pour y ajouter des éléments visant à limiter les pertes de milieux humides. Elle prévoit désormais des mesures de compensation dans les cas où il n’est pas possible d’éviter de porter atteinte à ces milieux. Selon M. Rousseau, l’autorisation que détient la Ville n’exigerait pas qu’elle se conforme aux dispositions de la législation actuelle.
Emmanuelle Beaumier, géographe membre du Groupe de recherche interuniversitaire en limnologie (GRIL) a été choquée d’apprendre que la Ville voulait détruire ce milieu. « Les milieux humides et les tourbières sont très importants pour la lutte aux changements climatiques. Elles capturent le carbone de l’air et le conservent pour des milliers d’années dans ses sols. Détruire ce terrain-là libérerait des quantités importantes de carbone dans l’air, qui contribuent aux gaz à effet de serre. »
La coalition demande que la Ville de Trois-Rivières commande une étude estimant la quantité de carbone libérée par la destruction de ces milieux humides ainsi que la quantité de carbone qui ne pourra plus être séquestré annuellement suite à leur destruction.
« L’un des problèmes, estime Mariannick Mercure, c’est qu’on détruit des milieux qui permettent de contrer les changements climatiques, mais que ce n’est jamais considéré dans le bilan. Si la Ville cède aux pressions économiques pour aller de l’avant avec la destruction de ce milieu naturel, elle devrait au moins verser une compensation financière, via nos outils locaux, comme la bourse du carbone qui a été mise sur pied à Trois-Rivières. »
Une question morale
« Il y a un consensus clair sur le fait que des projets comme ceux-là sont totalement injustifiables du point de vue moral », affirme Charles Fontaine, membre du groupe de recherche en éthique environnementale et animale (GREEA). « À un moment donné, il va falloir repenser notre relation avec le territoire, on ne pourra pas juste continuer de l’exploiter. Il faut se poser les bonnes questions sur l’avenir que nous voulons pour la région. Ce n’est pas parce qu’une chose est légale que c’est forcément moral ou éthique. »
Claude Ferron, ex-conseiller municipal, estime que la Ville pourrait simplement décider de ne pas développer ce secteur. Elle devrait plutôt optimiser ce qui est déjà développé. « Ce n’est pas cohérent avec la politique environnementale qui a récemment été adoptée et qui vise notamment la préservation des milieux humides, » indique-t-il.