Dans le cadre de son 40e anniversaire, La Gazette de la Mauricie et des environs a la chance de compter sur des ambassadrices et ambassadeurs de différents horizons, des gens de renom qui sont des personnes significatives dans notre collectivité. Ces ambassadrices et ambassadeurs apprécient La Gazette et en parlent dans leur entourage.
Vous êtes quelqu’un d’impliqué en musique, en patrimoine et en écriture, ; en quoi ces trois volets culturels sont importants dans notre identité québécoise ? En quoi est-ce justifié que l’État finance en partie ces secteurs ?
Tout d’abord, ces trois aspects sont fondamentaux pour comprendre l’évolution culturelle, sociale et politique de la nation québécoise depuis son émergence dans le Nouveau monde. La musique, l’écriture et l’histoire sont au cœur de l’identité des Québécois et des Québécoises depuis le tout début de la Nouvelle-France il y a presque 500 ans déjà. Même nos premiers contacts avec les Autochtones sont auréolés de chants liturgiques, d’alliances stratégiques et de traités comme la Grande Paix de Montréal en 1701, mais aussi de symboles patrimoniaux (canot, raquette, capot de poil, ceinture fléchée, sirop d’érable, légendes), c’est donc certainement un héritage en commun.
Si l’on veut saisir l’homo quebecensis dans son essence, il faut parfois replonger dans les récits des coureurs des bois et des missionnaires, mais il faut aussi relire les discours de Louis-Joseph Papineau, se pencher sur les poètes du 19e siècle tels que Louis Fréchette et connaître les groupes phares de la Révolution tranquille (Harmonium, Beau dommage, Offenbach, etc.).
Depuis que l’État du Québec s’est donné une véritable politique culturelle, en 1992, qui met l’accent non seulement sur la protection, mais aussi sur la valorisation et la diffusion de la culture d’ici, il devient impératif que notre gouvernement investisse massivement dans le secteur culturel. En tant que francophones, nous représentons seulement 2 % de la population de l’Amérique du Nord, alors la culture québécoise devient notre ciment social, notre carte de visite pour les touristes, mais surtout le socle sur lequel nous devrions intégrer les gens qui viennent d’ailleurs et s’installent ici. Il est temps d’honorer notre devise nationale : Je me souviens. Au-delà de l’intervention essentielle du gouvernement, c’est aussi notre responsabilité collective de transmettre aux générations qui nous suivent cette fierté d’avoir une culture originale et unique.
Vous avez un parcours diversifié : professeur, musicien, auteur, vous êtes membre de différents comités, etc. Pourquoi avoir choisi un chemin professionnel non linéaire ? Qu’est-ce qui vous guide dans vos choix et vous inspire ? Que diriez-vous à des jeune qui s’interrogent avec inquiétude face à leur choix de carrière ?
Je crois que ce qui m’a d’abord guidé, c’est ma passion. En tant qu’universitaire de première génération, j’ai toujours été encouragé par mes parents à poursuivre mon chemin vers la réalisation de mes rêves : devenir musicien, publier des livres, connaître par cœur ma société et mon pays. De musicien professionnel je suis passé à philosophe, puis à historien. Ce parcours peut sembler non linéaire, mais il reflète exactement mes loisirs les plus importants et ce qui m’a poussé à transformer ces passions en objets d’étude et m’a permis d’obtenir un doctorat sur l’histoire de la musique au Québec.
Je n’ai jamais vraiment choisi les études supérieures pour faire une carrière, au contraire, j’ai décidé d’investir en moi, d’acquérir suffisamment de connaissances et de savoirs pour satisfaire cette soif de comprendre le Québec, d’élargir mon cercle social, ce qui me permetde devenir un citoyen engagé qui lutte pour assurer l’avenir de la société québécoise. Mon conseil à la jeune génération est justement : suivez vos passions et réalisez vos plus grands rêves, car l’important est de se découvrir comme être humain créateur et d’ensuite fixer nos objectifs de vie en fonction de ce qui nous fait vibrer.
Quel est votre coup de cœur culturel à découvrir en Mauricie ?
Premièrement, la vie musicale mauricienne est riche de petites scènes et de festivals locaux qui font rayonner nos artistes, tel que le Festival de la solidarité musicale Widewood devenu L’Ultime édition. Deuxièmement, nous avons la chance d’avoir une panoplie de musées qui racontent notre histoire et qui protègent des milliers d’artefacts du patrimoine national québécois. En ce sens, le Musée POP, le Manoir Boucher de Niverville et le Séminaire Saint-Joseph sont pour moi des incontournables. Enfin, je pense que les nombreuses ligues d’improvisation de la région complètent ce panorama culturel, et il vaut la peine d’aller encourager ces comédiens et comédiennes qui m’impressionnent encore chaque fois que je les vois.
Pourquoi avez-vous accepté d’être ambassadeur de La Gazette de la Mauricie ?
D’emblée, j’ai accepté cet honneur car cela souligne mes 10 ans d’implication bénévole en tant que chroniqueur d’histoire dans ce journal. En fait, je crois que j’ai beaucoup de chance que La Gazette de la Mauricie valorise mes textes et ma compréhension de l’aventure québécoise en Amérique du Nord. Ensuite, j’ai l’occasion de publier un recueil de textes dans le cadre de son 40e anniversaire. Ainsi, c’est une formidable vitrine pour une discipline, l’histoire, qui est parfois malmenée dans les médias, et c’est pourquoi je tenais à rendre la pareille à une publication d’ampleur et de qualité.
Qu’est-ce qui distingue La Gazette des autres médias ?
Justement, ce média se distingue notamment par son désir de rejoindre les citoyens et citoyennes partout dans la région et même au-delà. Non seulement ce journal a comme mission de défendre le bien commun, ce qui m’anime personnellement, mais il permet également de donner la parole aux gens de la région et d’approfondir certains sujets majeurs (surconsommation, pauvreté, pollution de l’environnement, crise du logement, indépendance énergétique, dangers de l’énergie nucléaire, réconciliation avec les Autochtones, etc.) qui sont trop souvent laissés de côtés dans les grands médias. En plus de sa gratuité et de l’étendue de son réseau (20 000 exemplaires), c’est une publication essentielle à la vie démocratique du Québec qui permet de faire des ponts entre les diverses idéologies politiques.
Quelle est votre chronique ou rubrique préférée au sein du journal ?
Évidemment, la première chronique que j’aime lire est celle de mes collègues historiens qui alternent avec moi depuis quelques années. Outre les dessins et les caricatures, j’apprécie entre autres les chroniques culturelles qui me font connaître de nouvelles œuvres (musique, cinéma, littérature) ou les entrevues avec des artistes de la relève qui nous font découvrir leur univers.
Pourquoi les gens devraient-ils lire La Gazette ?
Pour de nombreuses raisons : d’abord parce qu’il s’agit d’un reflet sincère de ce que pense la communauté mauricienne qui sait prendre sa place dans les grands débats nationaux. On y retrouve les textes de plusieurs spécialistes dans leur domaine qui sont capables d’apporter des points de vue critiques ou complémentaires dans l’espace public afin que les citoyens et citoyennes puissent ensuite prendre position de façon mieux éclairée. De plus, les sujets sont toujours d’actualité et la diversité des opinions permet souvent de refléter les grandes tendances sans tomber dans la caricature.
Pourquoi les gens devraient-ils faire un don à La Gazette ?
Après 40 années d’existence, ce journal a su traverser les tempêtes, mais face aux bouleversements actuels causés par l’envahissement du numérique et face à la triste disparition des médias, qui va en s’accélérant, dans les régions éloignées des grands centres urbains, il est fondamental que nous puissions garder notre capacité à communiquer, à prendre la parole dans l’espace public. J’encourage donc la population à soutenir financièrement La Gazette de la Mauricie afin de pérenniser ce souci d’informer adéquatement la communauté régionale et de faire rayonner la culture québécoise.