S’il ne fait aucun doute qu’un revenu décent permet de vivre mieux, jusqu’à quel point la hausse du revenu contribue-t-elle à améliorer le bien-être général ? La grosseur du niveau de vie moyen d’une population, qu’on mesure avec le PIB par habitant, est-elle garante de son mieux-être ? Dans quelle mesure la répartition équitable du revenu influence-t-elle le bien-être ?
Les enquêtes [1] réalisées dans plusieurs pays montrent que le bien-être fait référence à des dimensions précises de la vie : état de santé, éducation, temps libre, qualité et sécurité d’emploi, environnement sain, richesse des liens familiaux et sociaux, cohésion sociale, accomplissement de soi, etc.
Si toutes les enquêtes confirment que le niveau de bien-être augmente au fur et à mesure que le PIB par habitant grossit, elle montre cependant que dépassé un certain seuil de richesse, la hausse du bien-être est de plus en plus faible, comme le montre le graphique ci-contre. Par ailleurs, on observe que les pays qui ont les plus gros PIB par habitant n’arrivent pas en tête du classement général du bien-être. En effet, bon nombre de pays ont un niveau de bien-être supérieur à leur PIB par habitant (courbe transversale du graphique), alors que d’autres pays, comme les États-Unis et le Royaume-Uni, ont un niveau de bien-être inférieur à leur PIB par habitant. Comme quoi la richesse moyenne d’un pays n’est pas suffisante pour expliquer le niveau de bien-être.
C’est donc dire que d’autres dimensions que la richesse et la possession matérielle jouent un rôle important dans le bonheur des populations. Les enquêtes montrent que les gens se disent en général plus satisfaits de leur vie quand ils travaillent moins, même si cela diminue leur revenu, car ils peuvent accorder plus de temps à leurs proches. D‘autres dimensions comme la qualité de l’eau et de l’air, l’état de santé, l’éducation et la cohésion sociale pèsent aussi dans l’estime du bien-être.
Bien-être et inégalités
Les enquêtes montrent aussi que les inégalités sont associées à une moins bonne santé et à une moins grande réussite scolaire, lesquelles affectent négativement la cohésion sociale et le bien-être général. Les conclusions d’une vaste étude menée par des épidémiologistes britanniques vont dans le même sens : le bien-être est inférieur dans les pays riches les plus inégalitaires, parce que les problèmes sociaux et de santé sont de trois à dix fois supérieures à ceux des sociétés plus égalitaires [2].
Le niveau de bien-être est donc corrélatif à la cohésion sociale et à la qualité de vie. Si produire plus et augmenter toujours plus la richesse ne contribuent pas à réduire les inégalités et à augmenter le niveau de bien-être général, c’est que la consommation a atteint ses limites. Croire le contraire ne ferait que perpétuer le cercle vicieux d’une surconsommation qui engendre la détérioration des fondamentaux de la vie sur Terre, c’est-à-dire la qualité de l’air et de l’eau, et de l’environnement en général.
Dont celle que l’OCDE mène depuis 2011, auprès de ses 35 pays membres, avec l’indicateur du vivre mieux. Cet indice mesure la qualité de vie et les conditions matérielles des gens à partir des critères suivants : santé, équilibre travail-vie personnelle, éducation, liens sociaux, qualité de l’environnement, sécurité personnelle, bien-être, revenu et richesse, emploi et salaires, logement.
Sources :
[1] Dont celle que l’OCDE mène depuis 2011, auprès de ses 35 pays membres, avec l’indicateur du vivre mieux. Cet indice mesure la qualité de vie et les conditions matérielles des gens à partir des critères suivants : santé, équilibre travail-vie personnelle, éducation, liens sociaux, qualité de l’environnement, sécurité personnelle, bien-être, revenu et richesse, emploi et salaires, logement.
[2] Kate Pickett, Richard Wilkinson, L’égalité, c’est mieux. Pourquoi les écarts de richesse ruinent nos sociétés, Éditions Écosociété, 2013, 384 pages.