Paule Vermot-Desroches, présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, section Mauricie, janvier 2019
« L’indépendance n’est pas une récompense, c’est une responsabilité » – Pierre Bourgault
Cette citation du journaliste Pierre Bourgault, elle devrait nous habiter chaque jour, à chaque moment de notre vie où l’on cherche à comprendre notre monde, à l’analyser, à le commenter et, idéalement, à le changer pour le mieux.
Pour être libre et indépendante, une société doit d’abord et avant tout être bien informée. Et pour avoir une société bien informée, il faut une diversité des voix. La diversité des sources d’information entraîne forcément une multitude de sujets couverts et une variété d’analyses, de points de vue et d’angles abordés. Au final, la diversité des voix offre à une société la capacité de regarder le monde sous tous ses angles, pour s’en faire une idée la plus juste possible.
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Dans un écosystème médiatique comme celui que l’on trouve en Mauricie, la Gazette de la Mauricie occupe alors une place importante. Dans une région comme la nôtre, la présence d’un média communautaire est essentielle non seulement pour assurer la multiplicité des voix, mais surtout pour offrir une vitrine supplémentaire à de nombreux organismes, communautés, sociétés, entreprises, mouvements communautaires, minorités et mouvements sociaux qui peuvent, par le biais de ses pages, rejoindre davantage de citoyens afin de toujours grandir, poursuivre leur mission et mettre en lumière leurs réalisations.
Or cette diversité des voix est aujourd’hui menacée. Non pas que le contenu d’un média comme la Gazette de la Mauricie ou tout autre média traditionnel, communautaire ou non, ne soit plus pertinent. Bien au contraire. Toutefois, l’arrivée dans le monde des communications de géants comme Facebook et Google a considérablement grugé la tarte des revenus publicitaires généralement destinés aux médias.
C’est la loi du marché, me direz-vous. Le problème est que Facebook et Google ne produisent pas de contenu, comme peuvent en produire les médias de la Mauricie. C’est plutôt le contenu de ces médias que retransmettent ces géants du Web, tout en grugeant leurs revenus publicitaires ET en ne payant aucune redevance, ni aucun impôt au Canada. Une forme d’évasion fiscale réalisée au détriment de l’indépendance d’une société et de sa saine santé démocratique. Quelle ironie !
De l’espoir ? Il y en a. Notre gouvernement a récemment fait un pas dans la bonne direction, en annonçant lors de sa mise à jour économique une forme d’aide aux médias, dont les balises seront sous peu déterminées par un comité qui reste à être formé.
Mais vous, comme lecteur, comme citoyen, comme entrepreneur de la région, vous avez également un rôle à jouer pour la survie de ces médias, pour le maintien de la diversité des voix. Prenez conscience des gestes que vous posez au quotidien, des sources d’information auprès desquelles vous vous abreuvez et que vous choisissez de repartager. Revendiquez le droit à une information de qualité en comprenant aussi l’importance de soutenir ces médias qui génèrent ce contenu fouillé, documenté, vérifié, objectif et libre de tout intérêt autre que celui du droit du public à l’information.
Parce que, sachez-le, Facebook et Google ne dépêcheront jamais un journaliste dans une conférence de presse du secteur Cap-de-la-Madeleine pour connaître les dernières réalisations de la Démarche de revitalisation des premiers quartiers, ne chercheront jamais à mettre en lumière les missions dans lesquelles s’investit le Comité de solidarité Trois-Rivières et, n’auront jamais les ressources pour faire connaître au public les dernières initiatives en matière de lutte à la pauvreté en Mauricie ou encore les succès économiques de nos entrepreneurs d’ici.
Si la Mauricie veut avoir une voix, elle doit s’investir pour en donner une à ses médias.