Florie Dumas-Kemp – Opinion – mai 2021 Des logements toujours plus chers, un salaire minimum qui stagne, une hausse des rénovictions, des logements insalubres, une flambée de l’immobilier, un taux d’inoccupation extrêmement bas à l’avantage des propriétaires et favorisant la discrimination envers les locataires… la crise du logement est bien réelle et ne nous épargne pas en Mauricie. À l’image de son obscurantisme habituel, le parti de la Coalition Avenir Québec (CAQ) s’entête à ne pas reconnaître cette crise nationale de santé publique. Et au cœur de la crise du logement se trouve celle des violences patriarcales et des féminicides. Si la CAQ souhaitait réellement endiguer la violence conjugale, elle agirait sans plus attendre pour le droit au logement dans la province. Voyons comment un gel et un contrôle des loyers permettrait de s’attaquer au problème.
Le droit à un logement libre de violences
Le droit au logement est un aspect fondamental de la santé publique. En effet, le logement est beaucoup plus qu’un toit et des murs ; il constitue notre lieu principal de vie et il affecte notre santé globale : physique, mentale et sociale. Selon le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels, endossé par le Québec depuis les années 1970, nous avons tous et toutes le droit à un lieu où l’on puisse vivre en sécurité dans la paix et la dignité. Le logement, c’est notre cocon, un espace qui devrait rimer avec bien-être et sérénité. Pourtant, c’est aussi le lieu principal des violences vécues par les femmes. Comme le souligne le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ), près des deux tiers des violences conjugales et sexuelles sont commis dans le lieu de résidence des survivantes et des victimes.
Les causes systémiques
Les mécanismes de la violence conjugale – contrôle, menaces, isolement, etc. – rendent extrêmement difficile pour les victimes et survivantes la décision de quitter leur partenaire. De plus, la violence économique, comme le vol d’argent ou d’identité ou le contrôle des finances par le conjoint, est l’une des manifestations les plus courantes de la violence conjugale. À ces mécanismes s’ajoutent les barrières économiques et sociales qui entretiennent la pauvreté et la précarité des femmes. Bien que la violence conjugale et la domination masculine traversent les classes sociales, la pauvreté et la dépendance financière font partie des causes systémiques du problème.
C’est là que le droit et l’accès à un logement décent et abordable entrent en jeu. Toutes les conditions doivent être réunies pour que les survivantes puissent y avoir accès lorsqu’elles décident de quitter leur conjoint violent. Cela passe par :
- Des investissements massifs dans le logement social comme le réclame le FRAPRU : 50 000 logements sociaux en cinq ans, dont 1 345 pour la Mauricie.
- Le logement social de deuxième étape destiné aux victimes de violence conjugale. Pour l’année 2019-2020, le taux de refus des demandes d’hébergement auprès des maisons membres de l’Alliance des maisons de deuxième étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2) atteignait 75 % à Montréal et 37 % dans les régions où le service existe. Il y a une seule maison de ce type en Mauricie.
- Un gel des loyers pour amoindrir la flambée actuelle du coût des logements, qui touche durement les locataires, majoritairement des femmes.
- Un contrôle public des loyers pour garantir la fin des hausses abusives de loyers.
Ces mesures sont réclamées par le mouvement pour le droit au logement partout au Québec. Comme le souligne la porte-parole du RCLALQ, Marjolaine Deneault, « si les femmes peuvent avoir accès à des logements abordables, elles oseront davantage quitter un logement violent. Bien que ces mesures bénéficieraient à l’ensemble des ménages locataires, elles sont essentielles pour assurer la sécurité des femmes locataires ». Il faut plus que « colmater les brèches » ou rattraper momentanément le sous-financement chronique des services destinés aux victimes de violence conjugale, il y a urgence d’agir à la racine des crises. Au moment d’écrire ces lignes, 10 femmes ont été assassinées par leur conjoint ou un ex-conjoint depuis le début de l’année. Le féminicide zéro requiert, entre autres, un filet social fort, des logements sociaux ainsi que le gel et le contrôle des loyers. « Pas une de plus. »
Aide et ressources InfoLogis Mauricie – 819-694-6976 Organisme voué à la défense des droits des locataires en Mauricie. Les comités logement peuvent aider avec les démarches de résiliation de bail en cas de violences sexuelles et conjugales, et ils peuvent aussi diriger les demandeurs vers les autres ressources d’aide. Fiche Éducaloi : Mettre fin à un bail en raison de violence conjugale ou sexuelle SOS violence conjugale Écoute téléphonique, soutien psychologique, intervention immédiate et service de référence aux maisons d’hébergement (SOS violence conjugale peut appeler pour toi). Aide bilingue, gratuite, anonyme et confidentielle 24/7 par téléphone, texto, clavardage et courriel. Ligne-ressource pour victimes d’agression sexuelle et d’exploitation sexuelle : 1-800-363-9010 (sans frais) Offre un service bilingue, gratuit, anonyme et confidentiel 24/7, partout au Québec. 1-888-933-9007 Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) Le CALACS offre de l’aide directe aux femmes et aux adolescentes agressées sexuellement. Soutien téléphonique, groupes de soutien, service d’accompagnement aux victimes afin de les appuyer dans leurs démarches et services aux proches des victimes. CALACS Trois-Rivières – 819-373-1232 ou 1-866-373-1232 (sans frais) CALACS Entraid’Action – Shawinigan – 819-538-4554 ou 1-855-538-4554 (sans frais) Centre d’aide aux victimes d’actes criminels de la Mauricie – 819-373-0337 ou 1-888-522-2822 (sans frais) Les CAVAC offrent des services spécialisés à toute personne victime ou témoin de tout acte criminel, et à ses proches, que l’auteur du crime soit ou non identifié, arrêté, poursuivi ou reconnu coupable.