Opinion – Sébastien Bois, citoyen de Shawinigan – 18 février 2022
Certaines personnes plus à risque devraient-elles « éviter l’eau du robinet », même bouillie, pour une partie de Shawinigan ?
J’ai discuté avec une conseillère en environnement de la Santé publique de la Mauricie le 16 février dernier. Cela fait de nombreuses années que l’eau « potable » d’une portion de Shawinigan et Shawinigan-Sud est problématique due à la présence de trihalométhane et d’acide haloacétique. La nouvelle usine devait régler le problème. Elle m’informe que les femmes enceintes, les bébés et les personnes dont le système immunitaire est affaibli devraient « ÉVITER » de boire l’eau du robinet pour les secteurs touchés par l’avis d’ébullition.
Après ma discussion avec la Santé publique, j’ai contacté les communications à la ville de Shawinigan. On m’informe qu’une brochure a été produite avec la Santé publique. Après lecture, il n’est fait mention nulle part que les personnes plus à risque devraient « ÉVITER » de boire cette eau. Tout comme d’autres citoyens, j’ai demandé la tenue d’une rencontre publique, dès que les mesures sanitaires seront assouplies, avec les citoyens, des responsables à la ville et des intervenants extérieurs.
Ce dossier complexe concerne plusieurs acteurs et amène un lot de questionnements.
– La ville et la Santé publique minimisent-elles les dangers sur la santé pour les populations plus à risque ?
– On sent qu’il y a une cristallisation d’une partie des élus d’un côté et d’une partie de citoyens de l’autre. La ville en se retranchant et en évitant d’informer adéquatement la population soulève un tollé et de l’indignation. Un élu à même intimidé un organisme communautaire soucieux des aînés. Nous assistons à des conseils de ville avec une langue de bois, désincarnés et toujours consensuels pour l’adoption des points à l’ordre du jour. Ensuite un seul interlocuteur répond à toutes les questions. La démocratie est effritée et encourage un désabusement des citoyens à l’égard de la politique municipale. Des citoyens, bien qu’ils soient une minorité, dérapent à leurs tours et manques de respect à l’égard des élus, d’autres alimentent des thèses complotistes. L’heure n’est-elle pas à une saine communication respectueuse afin de ramer tous ensemble pour régler le problème de l’eau potable ?
– La transnationale Suez (GE) ayant construit l’usine ne devrait-elle pas payer pour la nouvelle membrane frôlant le million de dollars et les inconvénients associés ? Suez est aussi porteuse de scandales dans d’autres pays. Paris a d’ailleurs remunicipalisé ses eaux qui étaient gérées en partie par cette entreprise, pourtant française.
– La privation de l’opérationnalisation de l’usine est problématique. Il est essentiel que notre collectivité conserve l’expertise de la gestion de son eau potable. Le maire m’a informé, lors des élections municipales de cet été, qu’il songeait à remunicipaliser l’usine. Simple songe ou une résolution et des actions du conseil de ville s’enlignent en ce sens ?
– Qu’en est-il des exigences provinciales de prendre le contrat du « plus bas soumissionnaire » ? Cette notion devrait-elle être remise en cause afin d’obtenir des services durables et de qualités ?
– Comment se porte l’écosystème aujourd’hui autour de l’usine ? Au-delà des espèces mortes, il y a la présence de la tortue des bois, une espèce menacée. La tortue ne prendra pas la parole en public. Elle demeure néanmoins un bio-indicateur de la santé fragile de nos habitats.
Si les Québécois ont hâte de voir « la lumière au bout du tunnel » de la crise sanitaire, plusieurs Shawiniganais ont hâte de voir l’eau potable au bout du robinet et plus de transparence des acteurs concernés : ministère de l’Environnement, Santé publique, responsables municipaux (élus et fonctionnaires) et l’entreprise Suez.
Sébastien Bois, Shawinigan