Du 7 au 19 décembre, Montréal accueille des représentants du monde entier pour la 15e réunion de la Conférence des parties (COP15) à la Convention sur la diversité biologique des Nations Unies. L’un des objectifs est d’adopter un cadre mondial pour protéger 30 % des terres et des mers de la planète d’ici 2030.
Le temps presse : les espèces sont en déclin partout dans le monde et la crise est sans précédent. Au Canada, un rapport fédéral récent évalue que 873 espèces sont gravement en péril, 1 245 sont en péril et 2 765 sont vulnérables. Mondialement, 25 % des espèces sont menacées, selon l’IPBES, un organisme scientifique intergouvernemental qui étudie les écosystèmes et la biodiversité. Au total, cela correspond à plus d’un million d’espèces animales et végétales.
Causes sous-jacentes et changement de paradigme
Le Collectif COP15, qui regroupe plus 67 organisations de la société civile québécoise, se mobilisera tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la conférence pour proposer des solutions et inciter les dirigeants à passer à l’action.
Non seulement faut-il réparer les impacts visibles du déclin de la nature, mais il est essentiel « d’agir sur les facteurs politiques, économiques et sociaux qui poussent nos sociétés à surexploiter la nature et à causer sa perte », peut-on lire sur le site Internet du collectif.
Le dernier rapport de l’IPBES, élaboré par 145 experts issus de 50 pays, identifie ce qui occasionne directement le déclin de la biodiversité (voir l’encadré). Les « causes sous-jacentes » indirectes découlent cependant des valeurs sociales et des comportements, comme les modes de production et de consommation, les tendances démographiques, le commerce, les innovations technologiques et la gouvernance.
Facteurs directs de changement de la nature (par ordre décroissant) :
- Modification de l’utilisation des terres et des mers
- Exploitation directe des organismes vivants
- Changement climatique
- Pollution
- Espèces exotiques envahissantes
Source : IPBES, 2019
Ce document – l’équivalent en biodiversité du rapport du GIEC pour le climat – insiste sur le fait que des « changements transformateurs » sont nécessaires à tous les niveaux, « du local au mondial ».
« Ce sont des discussions qu’on a au sein du mouvement environnemental depuis longtemps », explique Pier-Olivier Boudreault, directeur de la conservation à la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP) et résident de Saint-Élie-de-Caxton. « Mais là, on a un groupe d’experts internationaux crédibles qui vient nous dire : ‟il y a un changement de paradigme à opérer dans notre relation avec la nature et dans notre système économiqueˮ ».
Décroissance et sobriété
La SNAP tiendra d’ailleurs un événement d’une durée de trois jours qui portera sur les solutions aux causes sous-jacentes de la perte de biodiversité. Le programme comprend notamment des conférences sur la décroissance, sur les modes de vie sobre ainsi que sur les façons de réduire l’utilisation des ressources et d’adopter de nouvelles valeurs de société.
« La soif de croissance économique est à la source de l’exploitation des ressources et du déclin de la biodiversité, constate Pier-Olivier Boudreault. Ça fait des décennies qu’on parle de cet indicateur biaisé qu’est le produit intérieur brut (PIB) et de la nécessité de développer de nouveaux indicateurs pour mesurer le bien-être d’une société. On est rendu là. »
Par sa nature même, un changement transformateur peut susciter une opposition de la part de ceux qui ont des intérêts liés au statu quo. Ces intérêts particuliers doivent cependant être dépassés pour le bien de tous, souligne le rapport de l’IPBES.
Les COP sur la biodiversité sont beaucoup moins connues que les COP sur le climat. « Ce sont les deux grandes crises de notre époque et il y en a une qui reçoit beaucoup plus d’attention que l’autre », observe monsieur Boudreault. « Pourtant, les deux crises sont interreliées. En négligeant notre biodiversité, on empire la situation climatique et vice versa. »
Le Collectif COP15 évalue d’ailleurs que l’adoption du nouveau cadre mondial 2030 pour la biodiversité augmenterait les chances d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat.