Le vendredi 4 avril dernier, une quinzaine de femmes se sont réunies à l’une des maisons d’hébergement de La Séjournelle à Shawinigan. Sur place, entre autres : le Carrefour de sécurité en violence conjugale (CSVC), des travailleuses de La Séjournelle ainsi que des représentantes d’organismes de prévention de la violence conjugale et intrafamiliale venant tout droit de la Belgique. L’objectif était en quelque sorte de créer un réseau de solidarité.
Un espace de partage
Après une visite et la présentation des maisons d’hébergement de La Séjournelle, les travailleuses étaient amenées à discuter de leur expérience et de leurs observations. « Avec la montée du conservatisme, autant ici qu’en Europe, en tant que partenaire, on trouve l’initiative formidable », affirme la directrice générale du CSVC, Karine Messier Newman. Les travailleuses ont donc pu bénéficier d’un espace afin de partager leur angoisse relative à la condition féminine et de soulever les bons coups qu’elles réalisent dans leur milieu.
Les singularités de La Séjournelle
En entrevue, la directrice générale de La Séjournelle, Denise Tremblay, explique vouloir partager l’expertise shawiniganaise. Les maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale La Séjournelle ont plusieurs spécificités uniques au Québec, selon elle. Par exemple, il n’y a pas de contrainte de rentrées et de sorties, ni d’horaire préétabli, et ce sont les seules au Québec à accueillir les animaux domestiques. « C’est vrai que la gestion des animaux domestiques, c’est compliqué. Par contre, on considère que ça ne doit pas nous arrêter. On travaille pour les femmes, on doit faire le mieux pour elles, même si ça inclut de la gestion de plus. Certaines continuent de subir de la violence parce qu’elles ne peuvent pas amener leur animal. Certaines ont peur que leur conjoint violent s’en prenne à lui si elles viennent ici », explique-t-elle.
L’expertise shawiniganaise reprise
Ces petits détails qui caractérisent La Séjournelle constituent des actions parmi plusieurs autres. La grande innovation shawiniganaise réside toutefois dans le développement d’un outil clinique, dont l’utilisation est de plus en plus répandue au Québec, et également reprise par les travailleuses belges. Au tournant des années 2000, La Séjournelle, en collaboration avec l’UQTR, a conçu un modèle interactif et évolutif en violence conjugale. Il s’agit du modèle théorique PDC : processus de domination conjugale. À partir de celui-ci, une grille d’évaluation des risques a également été créée.
Ce modèle unique au Québec aide à comprendre et à évaluer les risques pour la sécurité des victimes et de leurs proches en tenant compte de données cliniques, scientifiques et actuarielles. Par exemple, on prend en compte le fait que les femmes ne sont pas les seules victimes dans cette dynamique et qu’il existe des spécificités propres à la violence ; autrement dit, il s’agit d’une approche intersectionnelle.
« C’est un outil clinique formidable que nous utilisons maintenant nous aussi. Nous sommes très contentes de bénéficier de cette expertise », ajoute Josiane Corruzi, de l’Association Solidarité femmes et Refuge pour femmes battues de de La Louvière, en Belgique.