Intentions de vote nationales
Après la sortie, la semaine du 16 septembre, des résultats de son sondage dans trois états clés, Quinnipiac récidivait la semaine dernière avec un sondage national [3] qui nous renseigne sur l’appui accordé à l’une ou l’autre des candidatures à la présidence par différents segments de la population. Voici, en vrac, ce que les résultats laissent entrevoir pour les électeurs probables :
- à l’échelle nationale, c’est une égalité parfaite avec 48 % des intentions de vote pour chacun des deux candidats (un peu à contre-courant de la plupart des autres sondages);
- 46 % des indépendants auraient une propension à voter pour Harris contre 48 % pour Trump;
- 54 % des femmes appuient Harris (41 % pour Trump) et 56 % des hommes appuient Trump (41 % pour Harris);
- les 18-34 ans optent à 51 % pour Harris (46 % pour Trump) et les 65 ans et plus, à 52 % pour Harris (44 % pour Trump);
- pour les autres groupes d’âge, les préférences sont légèrement en faveur de Trump pour les 35-49 ans et à égalité pour les 50-64 ans;
- Harris semble vraiment tirer son épingle du jeu du côté des intentions de vote des électeurs probables noirs avec 83 % des intentions de vote.
On note aussi que Trump plait non seulement aux hommes blancs, mais aussi aux électeurs hispaniques, même si les déportations massives promises par l’ancien Président les ciblent directement. Il y a là une pente à remonter pour Harris qui a les arguments pour le faire, mais qui peine, pour l’instant, à se débarrasser de la perception de sa piètre performance de Vice-Présidente dans le dossier de l’immigration.
Autre point d’analyse intéressant ressortant de ce sondage : le vote par la poste (incluant les électeurs enregistrés hors du territoire des États-Unis) est beaucoup plus populaire chez les démocrates (70 % contre 27 % pour les Républicains). Aux élections de 2020 (année record pour le vote par la poste – COVID oblige), plusieurs états ont priorisé le décompte des votes déposés en personne la journée de l’élection ce qui, dans certains états, montrait une avance des Républicains au début de la soirée électorale. Au cours de cette soirée, les votes par la poste ont été traités et la forte proportion des démocrates ayant eu recours à cette modalité a fini par inverser certaines tendances de début de soirée dans des états importants comme le Wisconsin, la Pennsylvanie, l’Arizona, le Michigan ou la Georgie. Ce fut d’ailleurs un des arguments de Trump pour justifier ses prétentions de fraude, lui qui a soutenu qu’il avait obtenu beaucoup plus de votes qu’en 2020 et qu’il était impossible que les avances aient disparues à moins que de faux bulletins de vote n’aient été comptés. Et il y a aussi son fameux coup de fil au Secrétaire d’état de la Georgie, le républicain Brad Raffensperger, pour qu’il lui trouve 11 780 votes; il a refusé de le faire et a enregistré sa conversation avec Trump !
Retour sur les états pivots
La semaine du 16 septembre avait été marquée par le sondage de Quinnipiac encourageant pour les Démocrates, en particulier dans les états pivots de la Pennsylvanie et du Michigan où Harris y détiendrait une avance de 5 points dans les deux cas.
Pour l’important état de la Pennsylvanie, les ardeurs se calment toutefois un peu depuis. Plusieurs nouveaux sondages ont été répertoriés par 538 et RPC, la grande majorité de ceux-ci mettant parfois les Républicains légèrement en avance ou parfois à égalité. Globalement, selon la moyenne pondérée des résultats des sondages, le site RCP donne (27 septembre) une avance de seulement 0,4 points aux démocrates et le site 538, de seulement 1,3 points. [4]
Au Michigan, d’autres sondages sont aussi venus calmer le jeu dans les espoirs démocrates. La moyenne pondérée des résultats des sondages pour cet état donne aux Démocrates une avance de 1,7 point selon RCP, et de 2,6 points selon 538. [5]
Le début de la semaine dernière semblait favorable aux républicains
Pour la Caroline du Nord, la Georgie, et l’Arizona un sondage du NYT / Siena College (électeurs enregistrés) [6], réalisé entre le 17 et le 21 septembre, a lui aussi retenu l’attention en cette semaine du 23 septembre. Ce sondage montre, pour Trump, une avance de 5 points en Arizona, de 4 points en Georgie et de 2 points en Caroline du Nord. Mais restons prudents. Les avances moyennes pondérées (27 septembre) en faveur de Trump ne sont que de 1,2 points (RCP) et 0,4 points (538) en Caroline du Nord, de 1,7 points (RCP) et 0,8 (538) pour l’Arizona, et de 2,4 points (RCP) et 0,9 (538) pour la Georgie.
Ajoutons le Nevada et le Wisconsin, deux autres états pivots. Pour le premier, les deux partis sont à toutes fins pratiques à égalité (entre 1,0 et 1,2 point d’avance pour Harris) et cette quasi-égalité persiste depuis au moins le début du mois d’août. Au Wisconsin, la course est à peine moins corsée, l’avance moyenne des Démocrates étant de 1,0 point selon RCP et de 2,3 points selon 538.
Un scénario étrange, mais possible (ceci n’est pas une prédiction !)
La lutte est intense dans tous les états pivots et les résultats sont hautement imprévisibles. Cette imprévisibilité admet une possibilité particulière présentée à la Carte 1. Les Démocrates gagnent tous les états de la côte ouest et ceux de la côte est au nord de la Caroline du Nord, en plus des états des Grands Lacs sauf l’Indiana et l’Ohio. Les Républicains remportent le reste des états ce qui donne, en fin de course, la présidence à Kamala Harris par une marge de deux GÉ.
Carte 1 – À deux GÉ de l’égalité
Mais ce qui est intéressant est que le parti qui remporte la victoire remporte aussi tous les votes électoraux (votes des GÉ) des états, sauf au Nebraska et au Maine. Dans ces états, deux votes électoraux vont au parti qui gagne l’état, et un vote électoral par district congressionnel va au parti qui l’emporte dans ces districts (3 au Nebraska et 2 au Maine).
Ce qui donnerait la victoire aux Démocrates dans le scénario de la Carte 1 est que le camp Harris réussirait à aller chercher au moins un vote électoral de district au Nebraska sans remporter l’état, tout en remportant le Maine sans ne concéder plus d’un vote électoral de district aux républicains. S’il advenait que les Républicains remportent les deux districts du Maine ou que les Démocrates n’en remportent aucun au Nebraska, le compte serait égal à 269 votes électoraux de chaque côté.
Une telle situation, où aucun des candidats ne remporte la majorité des votes électoraux (270 ou plus depuis 1961), est très rare. Le président ou la présidente serait alors élu-e par la Chambre des Représentants où chaque état aurait un vote. Et les états rouges prédominent ! Un scénario étrange, mais 2024 n’est-elle pas l’année des étrangetés du côté des élections américaines ?
Une autre possibilité d’égalité est illustrée à la Carte 2.
Carte 2 – Autre possibilité d’égalité
Contrairement à ce que suppose le scénario de la Carte 1, le Nevada, l’Arizona et la Georgie sont loin d’être gagnés par les Républicains. La Carte 2 inverse les couleurs de ces trois états comparativement à la Carte 1 et le résultat est un deuxième scénario d’égalité parfaite !
Pour terminer la semaine
La semaine se termine le 27 septembre par une visite de Kamala Harris à la frontière Mexicaine en Arizona. Le passage des migrants est un irritant majeur aux États-Unis, non seulement pour les états frontaliers que sont la Californie, l’Arizona, le Nouveau Mexique et le Texas, mais aussi pour nombre d’autres états qui finissent par en ressentir les contrecoups. Avec l’économie, l’immigration officielle et non officielle sont perçues par les américains, comme les « champs d’expertise » de Trump. On verra dans les sondages de début octobre si Harris pourra changer cette perception et s’imposer comme étant la femme de la situation.