Thierry A. Laliberté, Conseil régional de l’environnement Mauricie, décembre 2017
Afin de mieux encadrer la filière des hydrocarbures, quatre projets de règlements relatifs à l’exploration et à l’exploitation sont présentement à l’étude au ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles (MERN). La société civile a jusqu’au 9 décembre 2017 pour commenter cette nouvelle réglementation qui autoriserait les forages à proximité de secteurs habités ou protégés.
Le 10 décembre 2016, la Loi sur les hydrocarbures était adoptée en pleine nuit sous bâillon, provoquant l’ire des partis d’opposition. Pour en préciser les modalités, le MERN a récemment publié quatre projets de règlement. Il est notamment question d’imposer une distance séparatrice minimale de 175 mètres entre une zone résidentielle et un forage, allant jusqu’à 150 mètres dans le cas d’une résidence isolée et à 40 mètres de la voie navigable du fleuve Saint-Laurent. La porte est également ouverte à des opérations de fracturation hydraulique. Ces éléments, les plus controversés, ont rapidement été rapportés dans les médias.
La population a jusqu’au 9 décembre pour commenter la réglementation proposée
Projets de règlements à l’étude :
- Loi sur les hydrocarbures — Activités d’exploration, de production et de stockage d’hydrocarbures en milieu, p. 4211
- Loi sur les hydrocarbures — Activités d’exploration, de production et de stockage d’hydrocarbures en milieu, p. 4324
- Loi sur les hydrocarbures — Licences d’exploration, de production et de stockage d’hydrocarbures et autorisation de construction ou d’utilisation d’un pipeline, p. 4449
- Loi sur les mines — Pétrole, gaz naturel et réservoirs souterrains — Abrogation, p. 4480
Les commentaires sur ces projets de règlements doivent être envoyés au plus tard le 9 décembre 2017 par écrit à :
Mme Luce Asselin, Sous-ministre associée à l’Énergie et aux Mines (MERN), luce.asselin@mern.gouv.qc.ca
Transition verte : messages contradictoires
Dans un contexte où le Québec s’est doté en 2016 d’une politique énergétique visant une transition vers les énergies vertes et où le Canada a ratifié l’Accord de Paris visant un objectif similaire, plusieurs se demandent pourquoi continuer à promouvoir le développement de la filière des hydrocarbures. Le 28 octobre dernier, le ministre du MERN, Pierre Moreau, réitérait l’importance pour le Québec d’exploiter ses hydrocarbures, notamment dans l’objectif de financer un virage vers les énergies renouvelables et un plus grand recours au gaz naturel. Il est permis de se demander si le développement de cette filière peut aller de pair avec la transition énergétique prônée par Québec.
Tout en promouvant la nécessité de développer ce secteur d’activité, le ministre Moreau soutenait, le 30 octobre dernier, lors d’une allocution devant les membres de l’Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ), que l’acceptabilité sociale est une condition essentielle à tout projet. Il a alors tempéré l’effet des projets de règlement, affirmant que le gouvernement n’irait pas jusqu’à autoriser « l’exploration ou l’exploitation dans les cours d’eau, les parcs nationaux, près des garderies, des cours d’école ou au cœur des zones urbaines ».
Le milieu préoccupé
Pour le Regroupement vigilance hydrocarbures Québec (RVHQ), « les défis climatiques exigent le passage immédiat à l’économie d’énergie, à l’énergie passive et aux énergies renouvelables ». On craint aussi des conséquences sur la qualité de vie des citoyens et sur la qualité de l’eau potable, « que nous sommes tellement chanceux d’avoir », soulignait l’ancienne mairesse de Batiscan, Sonya Auclair. Cette municipalité fait d’ailleurs partie d’un regroupement de municipalités opposées au développement local de la filière des hydrocarbures.
Ces préoccupations étaient au cœur de la décision des élues et élus de la Ville de Trois-Rivières qui se sont opposés, par voie de résolution, au projet d’oléoduc Énergie Est, le 5 octobre dernier, à l’instar de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) et de la Fédération québécoise des municipalités (FQM). Les risques sur la qualité de l’eau potable et sur les milieux humides sont évoqués dans la résolution adoptée. On mentionne aussi que « les nouveaux projets de pipelines devraient être étudiés par des instances réglementaires crédibles et adaptées aux réalités environnementales et d’acceptabilité sociale actuelle », ce qui n’était pas l’approche adoptée à l’égard d’Énergie Est.
La question de l’acceptabilité sociale n’est donc pas réglée et pourrait faire achopper d’éventuels projets liés aux énergies fossiles. Chose certaine, il reste nécessaire de baliser la Loi sur les hydrocarbures pour éviter que ce secteur ne devienne un véritable far-west.