Alex Dorval – Culture – mars 2021
« Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement
Et les mots pour le dire arrivent aisément » – Nicolas Boileau-Despréaux
Le paradoxe de ces deux vers célèbres du contemporain et ami de Molière, Nicolas Boileau-Despréaux (L’Art poétique, 1674), tient bien au fait que chaque fois que nous voulons bien les citer, nous perdons soudainement la faculté de langage, la mémoire devient floue et les mots pour les dire nous reviennent plutôt difficilement…
À condition bien sûr d’être un locuteur ou une locutrice de niveau de compétition. Ce qui semble bien être le cas de la Trifluvienne Karolinka Drouin, figurant parmi les 10 finalistes participant au concours d’éloquence Délie ta langue ! organisé par le Bureau de valorisation de la langue française et de la Francophonie (BVLFF) de l’Université de Montréal (UdeM).
Native et toujours résidente de Trois-Rivières, Karolinka est étudiante de premier cycle à la Faculté de Droit de l’UdeM où elle complète sa deuxième année. L’étudiante se présente comme une amoureuse de la langue française : « J’adore le français, je défends régulièrement l’importance des cours de Littérature, entre autres. »
Née d’une mère tchèque et d’un père québécois francophone, Karolinka retrace le parcours linguistique qui a permis à sa passion pour les langues et la prise de parole de se forger :
« À la garderie, j’ai dû apprendre à bien séparer le tchèque et le français pour mieux me faire comprendre et me faire des ami.es. Puis très jeune, j’étais souvent celle à qui mes professeures de ballet demandaient de prendre la parole devant la classe. Plus tard, j’ai également fait de l’improvisation au CEGEP de Trois-Rivières. »
Lorsqu’on lui demande ce qui l’a menée à participer à un concours d’éloquence, l’étudiante indique qu’elle souhaitait d’abord simplement « se mettre au défi », mais qu’il est aussi très important de bien savoir s’exprimer en Droit.
« Perdre du terrain »
Le concours exige de la candidate qu’elle prépare un discours d’une durée maximale de 5 minutes, inspiré d’une expression française qu’elle doit lier à un enjeu social. Karolinka a choisi la locution : « perdre du terrain ».
« Avec la pandémie, on a l’impression de perdre du terrain dans presque toutes les sphères de notre vie, dont celle du loisir de voyager à l’étranger. Dans mon discours, je démontre comment, à travers la marche à pied, on prend conscience que le monde est plus grand qu’on pense et qu’il y a des territoires vastes à découvrir à proximité. Je fais la démonstration qu’à travers cette activité, finalement, on gagne du terrain. »
La Trifluvienne dit tirer son inspiration d’une part, de ses lectures du Philosophie magazine, et d’autre part, de sa passion pour Le Seigneur des Anneaux. Quel fouleur de sol ne s’est pas pris pour un hobbit au moins une fois lors d’une longue randonnée en montagne ? Pour Karolinka, il y a à travers la marche à pied quelque chose à se réapproprier en tant que peuple :
« On parle souvent de ce que c’est d’être québécois.e et je crois que la marche à pied pourrait nous aider à nous trouver. Il y a une part d’identité qui se découvre en parcourant le territoire », lance la Trifluvienne.
La finale
Les finalistes ont eu la chance de suivre une vingtaine d’heures de formations sur
mesure (création littéraire, rhétorique, rendre son texte vivant, accompagnement
personnalisé par des mentors-diplômés). Ils et elles seront dix à présenter leur texte à
l’oral, devant public et jury, lors de la finale de la 3e édition du concours. Pour sa part Karolinka peut également compter sur le soutien de son père dont elle a toujours admiré l’éloquence et avec qui elle se prépare en vue de la finale via des sessions Zoom, pandémie oblige.
La finale de la 4e édition de Délie ta langue se tiendra le 29 mars à 16h via internet. Pour plus de détails et pour vous inscrire en vue d’y assister, rendez-vous sur francais.umontreal.ca/delietalangue.