Alex Dorval – Environnement – Avril 2021 

Le gouvernement du Québec fait actuellement campagne pour promouvoir les divers efforts déployés dans le cadre de sa Stratégie d’intervention pour l’avenir du Lac Saint-Pierre. Nous avons cherché à rendre compte des pistes de solution envisagées pour remédier à la dégradation provoquée par l’activité humaine et assurer la réhabilitation de cet important plan d’eau, désigné Réserve mondiale de la biosphère de l’UNESCO en 2000.

La qualité de l’eau et la biodiversité du Lac Saint-Pierre ont été lourdement affectées depuis les années 1990 par les activités humaines dont les grandes cultures agricoles. La Stratégie d’intervention pour l’avenir du Lac Saint-Pierre du gouvernement du Québec permet toutefois d’entretenir l’espoir d’une réhabilitation de l’écosystème du lac. – Crédits : Dominic Bérubé

Le bassin versant du Lac Saint-Pierre touche 654 municipalités et 58 Municipalités régionales de comté (MRC). Près de trois Québécois sur quatre habitent un territoire drainé par ce bassin. La santé générale du Lac Saint-Pierre, la qualité de son eau et sa biodiversité sont toutefois lourdement affectées depuis quelques décennies par les pressions anthropiques provenant notamment des activités de transport maritime et routier, des déversements d’eaux usées, mais surtout des pratiques d’agriculture intensive en périphérie du lac.

Le garde-manger du Lac Saint-Pierre

« L’agriculture y est pratiquée depuis longtemps, mais il y a eu un changement drastique dans les années 1990 quand on est passé du foin et du pâturage aux grandes cultures », souligne Louise Corriveau, directrice générale du Comité Zone d’intervention prioritaire (ZIP) du Lac Saint-Pierre.

La pratique de mise à nu des sols, combinée à l’utilisation de fertilisants et pesticides, a mené à une problématique de sédimentation et de contamination des eaux du lac. « Quand l’eau monte au printemps, avec tous les sédiments, ça fait une belle grosse soupe aux pois. Ça bouche les cours d’eau, ça colmate les frayères », explique Mme Corriveau. Cette sédimentation, ajoute-t-elle, rend l’eau turbide et nuit à la reproduction des poissons, dont la perchaude. De plus, la mise à nu des sols nuit doublement puisque la perchaude a besoin de végétaux de plus de 30 cm de haut sous lesquels pondre ses œufs.

La perchaude n’est pas la seule à être menacée, plusieurs autres espèces animales et végétales le sont tout autant, prévient Mme Corriveau : « Avant 1990, avec le foin et les pâturages, les poissons pouvaient continuer à frayer et le zooplancton se créait en même temps. Et ça, c’est le garde-manger du Lac Saint-Pierre ! »

Mais pourquoi ne pas relocaliser les grandes cultures plus haut dans les terres ? Selon nos sources, la situation ne serait vraiment pas si simple.

D’abord, la problématique de turbidité des eaux n’est pas uniquement due aux pratiques des grandes cultures en périphérie du lac. Une bonne partie des eaux provenant des rivières qui se jettent dans le Lac Saint-Pierre sont elles aussi remplies de matières en suspension auxquelles s’agglomèrent les pesticides issus de l’agriculture pratiquée en amont. De plus, l’aménagement des territoires agricoles à des fins de grandes cultures aurait contribué au redressement des rivières, empêchant la rétention des sols et des contaminants qui s’y retrouvent. C’est le cas notamment de la rivière Yamaska dont les eaux troubles contribuent grandement au phénomène d’érosion des rives du lac.

À cela, il faut ajouter un apport considérable d’engrais qui sont emportés avec les sols et lessivés par les pluies. Ces engrais présents en trop grandes quantités nuisent à la croissance des plantes et réduisent la quantité d’oxygène dans l’eau ce qui, à son tour, détériore la qualité de l’habitat du poisson.

« La part de sédiments et de produits chimiques va continuer de se retrouver dans le lac si on ne travaille pas en amont aussi. C’est au niveau du savoir-faire et des pratiques agricoles en général qu’il faut changer », soutient Mme Corriveau.

Il n’est pas négligeable non plus de noter que la plupart des familles d’agriculteurs de la plaine cultivent ces terres et y vivent depuis plusieurs générations.

Lac Saint-Pierre – Crédits : Dominic Bérubé

Le rôle des gouvernements

« Ce que ça prend, c’est d’arrêter la mise à nu des sols, le respect de la mise en place obligatoire de bandes riveraines et des changements dans les façons de faire qui n’impliqueraient plus autant de fertilisants et de produits chimiques », souligne la directrice du comité ZIP.

D’ailleurs, si le gouvernement appliquait les règlements relatifs à la protection du littoral et à l’usage des pesticides, « il n’y aurait tout simplement plus d’agriculture sur les rives du Lac Saint-Pierre », fait remarquer Mme Corriveau qui dit ne pas voir souvent le ministère de l’Environnement dans la région. Il y aurait toutefois de l’espoir à l’horizon, nous dit-elle, référant aux recherches en cours et à la concertation entre les divers acteurs impliqués.

Des solutions à l’horizon

Mis sur pied en 2018, le Pôle d’expertise multidisciplinaire en gestion durable du littoral du Lac Saint-Pierre rassemble des équipes de scientifiques de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), de l’Université Laval et de McGill. En s’intéressant aux enjeux agricoles, environnementaux et socio-économiques, le Pôle a pour mandat de proposer une stratégie d’intervention dans la zone littorale favorisant une agriculture durable et respectueuse de l’écosystème du Lac Saint-Pierre. Le rapport final contenant les recommandations sera publié en 2022.

Une des solutions envisagées est la pratique de cultures intercalaires consistant à implanter des rangs de culture diversifiée au milieu des plantations de maïs et de soya. L’objectif est de trouver des types de végétaux pouvant survivre sous les eaux glacées et qui permettraient aux perchaudes d’y pondre le printemps venu.

L’aménagement de bandes riveraines à partir de diverses espèces de plantes serait également bénéfique pour filtrer les sédiments et éviter l’érosion des terres, phénomène qui suscite l’inquiétude autant des scientifiques que des agriculteurs de la plaine.

En 2010, la superficie des milieux humides au lac Saint-Pierre accusait un déficit net de 725 ha par rapport aux superficies qui étaient présentes en 1990, et ce, spécifiquement en raison des pressions anthropiques directes, peut-on lire dans le Plan de gestion intégré régional déposé en 2019 par la Table de concertation régional du Lac Saint-Pierre (TCRLSP).

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