Lorsqu’on pose la question à Stella Montreuil sur les raisons pour lesquelles elle s’est toujours investie dans le développement culturel à Trois-Rivières. Originaire de Trois-Rivières, elle résume simplement : « Chaque jour, j’ai rechoisi Trois-Rivières. »
Chez elle, cet engagement semble instinctif, couler de source. Elle a toujours baigné dans la culture.
En 1968, avec d’autres étudiant-es, elle a fondé le Ciné-Campus, aujourd’hui connu sous le nom de Ciné Trois-Rivières, qui offre une programmation diversifiée de films issus de différentes époques et cultures. Depuis, elle n’a jamais cessé de s’impliquer, que ce soit chez Culture Mauricie, au Salon08 du livre ou encore à l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières et même avec la Caravane Philanthrope, un collectif d’artistes humanitaires impliqué-es dans la société et habité-es par le désir de changer le monde un sourire à la fois. Cette année, dans le cadre des 31e Grands Prix de la culture de Trois-Rivières, elle a d’ailleurs reçu le Grand Prix de la culture.
En échangeant avec Stella Montreuil, on se rend rapidement compte que l’âge n’est, pour elle, qu’un chiffre. Dans son monde, ni la jeunesse ni la vieillesse n’existent véritablement. Il n’y a que des êtres humains avec qui elle échange, apprend et partage. Sa vision de la culture comme vecteur de communauté lui donne l’élan de poursuivre ses activités à la tête de Ciné Trois-Rivières.
Un milieu ouvert et fertile
Trois-Rivières est aujourd’hui reconnue comme une plaque tournante en matière de développement culturel. Pour Stella Montreuil, cette vitalité s’explique notamment par l’ouverture d’esprit des gens qui composent la communauté artistique trifluvienne. « Il n’y a pas vraiment d’égo, et c’est surtout très féminin. Moi, j’ai vécu quelque chose de fort et de positif. Notre portrait [comme femmes], c’est qu’on veut une culture accessible à tous et à toutes. »
De plus, la taille plus modeste de la ville, comparativement à des centres urbains comme Montréal ou Québec, favorise les liens humains. Elle permet aux personnes du milieu culturel de tisser plus facilement des partenariats et des collaborations. « La culture, en tout cas, dans notre région, est très importante, et elle se fait en toute collégialité », affirme-t-elle.
Éducation et épanouissement par la culture
Stella Montreuil a longtemps enseigné. Elle a débuté avec les matières de base avant de se consacrer à l’art dramatique. Pour elle, les arts permettent des apprentissages que peu de disciplines offrent.
« C’est à travers les arts et la culture que les jeunes peuvent se connaître. Faire de l’art, c’est en apprendre sur soi-même. C’est comme ça que les jeunes se dévoilent. » Selon elle, le plus important, c’est de travailler sur sa personnalité, car c’est ce qui mène à une profonde compréhension de soi. Et pour y parvenir, il faut parfois jouer un autre rôle que le sien. « Travailler sur ce que tu es, savoir ce que tu aimes et ce que tu veux devenir, je trouve que ça fait partie du développement culturel. »
Pour elle, l’exercice de l’art permet de s’approprier son identité, de faire sien son univers culturel : « La culture fait partie de ma vie. Je suis une grande lectrice, j’aime le théâtre, j’aime la musique, tout ça m’épanouit. C’est la même chose chez les jeunes. La culture permet l’épanouissement. »
Vieillir : une construction culturelle et sociale
Selon Stella Montreuil, s’il existe bien un processus biologique irréversible lié à l’âge, la notion même de vieillesse est, quant à elle, une construction sociale et culturelle. « Le vieillissement n’est pas une pathologie, c’est une réalité », dit-elle.
Elle déplore d’ailleurs la manière dont on isole les personnes âgées dans des résidences fermées. « Aujourd’hui, quand je regarde ça, je vois des résidences complètes pour personnes âgées, et j’ai beaucoup de difficultés avec ça. La vie, ce n’est pas juste des personnes âgées ensemble. C’est des gens de tous les âges. Alors je ne comprends pas comment on en est venu-es à les placer. On devrait investir pour que les gens puissent échanger entre familles. »
Elle appelle donc à des politiques publiques qui favorisent le maintien à domicile et le vivre-ensemble intergénérationnel. Pour elle, ce n’est pas seulement un enjeu pour les aîné-es, mais bien une richesse pour l’ensemble de la société. L’intergénérationnel semble donc être une vision culturelle, voire un privilège qu’une communauté peut s’offrir.

Photo : Dominic Bérubé / © La Gazette de la Mauricie et des environs
La culture, antidote au dépérissement
Stella Montreuil est encore vive et curieuse, et si on lui demande où elle puise cette énergie et cette lucidité, elle répond, sourire aux lèvres : « Parce que je me suis impliquée et que j’ai consommé de la culture. » Au fil des ans, elle en est venue à comprendre que c’est la culture qui lui a permis de développer cette passion pour l’humanité. « Je continue d’aimer la vie, je continue de m’intéresser à toutes sortes de choses. Vieillir, c’est dans la tête. Tant que tu as de l’intérêt et de la passion, c’est ce qui compte. »
Pour Stella Montreuil, le véritable enjeu n’est pas d’inclure davantage les personnes âgées dans le développement culturel, mais plutôt de continuer de favoriser l’inclusion de toutes et tous, des enfants jusqu’aux aîné-es, au cœur même de la vie communautaire.
Elle invite donc tout le monde à venir au Ciné Trois-Rivières dès le mois de septembre pour découvrir une nouvelle programmation et à continuer de prendre part activement à la vie culturelle trifluvienne.