David Robert, tel un iceberg musical, a beaucoup plus d’influence sur le milieu musical québécois qu’il ne le laisse prétendre avec ses airs gamins. Dans la foule, il y aura de quoi se sentir comme le nouveau venu au party de famille. Or, pour cette rencontre ensoleillée avant sa performance au Festivoix, nous voulions braquer le projecteur sur l’artiste solo.
Du folk au vent dans les cheveux
David a déjà une réponse toute prête à la question d’introduction que nous lui posons : « Je fais du folk franco en mode prose pour emporter. » Il s’agit en effet d’un son qui donne le vent dans les cheveux, une impression de mouvement, de voiture qui roule sur des grandes routes. Il suffit d’écouter son récent simple, « Avril », joliment mis en images, pour sentir l’eau saline.
L’instrument le plus intéressant de ses arrangements ? Bien que David Robert soit multi-instrumentiste, ce sont les mots qui volent la vedette. Lorsqu’il dédie la chanson « La falaise » à ses amis et amies artistes, on peut entendre : « Voir tous les racoins de la terre / Les admirer comme nos enfants / Trouver la crevasse la plus noire / L’éclairer fort comme le printemps ».
Or, il ne veut pas se décrire comme un poète : « On a beaucoup tendance à se comparer, et moi j’ai eu la chance de les côtoyer, les poètes, notamment de Trois-Rivières. On est une ville de poésie, donc il y a parmi les plus grands poètes de la francophonie qui habitent ici. J’en ai lu, des livres, et je les ai côtoyés, et j’ai fait de la musique avec eux, sur des textes de vrais poètes. Pour moi, c’est de la dentelle, ce qu’ils font. »
Connaître sa signature
Malgré tout, l’artiste connaît bien sa propre signature. D’abord, il y a ces sujets qui viennent chercher l’humaniste en lui : « Ça va être des choses qui m’interpellent, qui interpellent mes valeurs, mon éthique, que ce soit du bon ou du mauvais côté, quand ça me fait réagir violemment parce que je suis contre ce qui est en train de se produire, ou que je sois tout à fait en accord et que je veuille mettre en lumière une des beautés du monde. »
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Et l’autre grande tendance ? « Celle d’être pas clair! J’aime beaucoup le flou, j’aime garder de la place à l’interprétation, ça c’est mon côté poète », dit-il en riant. Il se rappelle des moments où des personnes sont venues lui mentionner leur interprétation de passages de ses morceaux, alors que la signification était tout autre à l’origine. « L’important, c’est de susciter des images, et souvent l’émotion qui vient avec va être la bonne quand même. Pour moi, c’est ce qui compte », souligne-t-il.
La création, cette bête mystérieuse
Quand on demande à David Robert comment ses compositions prennent forme, il semble y avoir réfléchi plus d’une fois. « Je peux pas dire que j’ai un processus, et j’ai essayé ! » Il mentionne avoir développé des trucs pour contrer la fameuse page blanche et avoir absolument besoin d’une résidence seul à peu près aux deux ans pour matérialiser ses notes collectées au fil du temps.
Or, les idées elles-mêmes semblent véritablement se pointer le nez à l’improviste : « Il faut toujours être alerte à ce qui nous interpelle, aux petits détails. Ce ne sont pas toujours les choses qui paraissent les plus évidentes. J’ai toujours été assez sensible à ça au niveau de la création, de rester à l’écoute de ce qui m’interpelle, que ça soit réaliste ou non. De se dire “Donnons-nous la chance que les choses se produisent, et on verra bien ce que la vie nous réserve.” »
Nu pieds et bien entouré
Bien qu’il crée seul au départ – et qu’il joue la plupart des instruments sur ses albums (!) –, David peut toujours compter, en cas de doute, sur ses amis musiciens et amies musiciennes, qui le rejoignent d’ailleurs sur scène ce jour-là au Festivoix. Reney Ray, artiste à la carrière bourgeonnante ; Guillaume Marchand, pianiste, entre autres, de Céline Dion, mais aussi son collaborateur depuis 25 ans, à qui il se souvient d’avoir envoyé un extrait de piano dont il n’était pas satisfait.
« Je lui ai dit “Tsé, le piano, sur cette chanson-là…” et il me répond “Ben non, il est ben correct, ton piano! Je prendrais pas de temps à refaire ça!” Des fois, c’est un petit manque de confiance, parce qu’on se compare avec des géants. Je suis content d’avoir son feedback, et j’ai laissé mes instruments à moi sur cette pièce-là.»
Effectivement, il semblerait qu’il s’est très bien débrouillé tout seul, nus pieds sur la scène du Quai du Festivoix, avec ses quatre camarades de scène à ses côtés.