La Salon du livre de Trois-Rivières se tiendra du 28 au 31 mars 2019 au Centre d’événements et de congrès interactifs du Delta (CECI). La thématique de la 31e édition est Soif de savoir. Le président d’honneur est nul autre que Normand Baillargeon, chroniqueur, enseignant et auteur de plusieurs livres dont le Petit cours d’autodéfense intellectuelle que nous avons déjà présenté dans une de nos précédentes éditions. Pour l’occasion nous lui avons demandé de rédiger une chronique en répondant à la question suivante : Comment étancher sa soif de savoir à l’ère du fake news et de l’information fast-food? Nos journalistes bénévoles Louis-Serge Gill et Luc Drapeau se sont aussi prêtés au jeu et répondent à leur manière à la question posée.Normand Baillargeon, collaboration spéciale, mars 2019 Étancher sa soif de savoir a toujours demandé du temps, du travail, de la curiosité, de la passion, des rencontres. Rien de tout cela n’a changé, bien sûr. Mais notre époque place l’assoiffé de connaissance devant de nouveaux périls qui pourraient lui faire avaler du poison s’il n’y prend garde.
De nouvelles menaces…
Vous avez sans doute entendu l’expression par laquelle on désigne parfois notre temps : ce serait l’époque de la post-vérité. Cette expression renvoie, pour le dire trop rapidement, à des choses aussi réelles que dangereuses, comme les fake news ; les revues prédatrices en sciences ; une malsaine corruption commerciale de la recherche scientifique ; des contenus commandités dont ce caractère est savamment occulté ; la propagande (politique ou autre) usant habilement des nouveaux médias, par exemple par la manipulation intéressée d’images ou de vidéos ; l’omniprésence des relations publiques dans des discours commerciaux, sociaux, politiques ; la propagation de théories de la conspiration et de pseudosciences ; et d’autres encore.
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Voici quelques modestes suggestions pour vous aider à naviguer plus sûrement en ces eaux troubles et à distinguer le bon grain de l’ivraie.
… et quelques contrepoisons
Les livres, les bons, non seulement gardent leur importance, mais, à mon avis, celle-ci se trouve aujourd’hui encore accrue. Les bons éditeurs (ils ne sont pas si difficiles à repérer et on les distinguera notamment de ceux qui publient à compte d’auteur…) tendent à publier de bons livres ; et ceux-ci sont recensés dans des publications crédibles, et souvent par des personnes elles aussi crédibles, ce qui aide à se faire une idée. Lisez de tels livres ! Et de telles recensions ! Il n’est jamais trop tard pour se doter d’une véritable et indispensable culture générale ouverte sur les diverses formes de savoir : mathématiques, sciences physiques, sciences humaines, histoire, religion, littérature et beaux-arts, philosophie, morale. Il se fait d’ailleurs justement, de nos jours, de l’excellente vulgarisation (scientifique, en particulier). Lisez-en ! Visionnez-en ! Abonnez-vous à une ou des revues de qualité dans un domaine qui vous intéresse. Lectures passionnantes et enrichissantes garanties. Fréquentez votre bibliothèque publique. Avec le temps, vous découvrirez des auteurs qui méritent votre estime : lisez-les ! Pour moi, ce furent notamment Martin Gardner, Jacques Prévert, Bertrand Russell, Noam Chomsky et Carl Sagan. Méfiez-vous de vos biais de confirmation, donc tendez à ne pas lire que des publications qui confirment ce que vous pensez ou à n’échanger qu’avec des gens qui partagent vos convictions. Ce danger d’enfermement est plus grand encore dans les médias sociaux. Il est en tout cas crucial d’écouter divers points de vue, en faisant preuve d’ouverture et de modestie, le but étant de pratiquer cette pensée critique faite de savoirs, certes, mais aussi d’habiletés et d’attitudes, à la fois intellectuelles et morales, et qui nourrit un rapport au vrai tenu pour accessible, difficilement sans doute, mais accessible, et qui pour cela se tient à l’écart tant du dogmatisme sectaire que des préjugés et du scepticisme radical. Justement, à propos des nouveaux médias : en naviguant sur Internet, pratiquez sans réserves ces trois techniques utilisées par les gens dont c’est le métier de déceler les faussetés (les fact-checkers) :
- Ne cliquez pas immédiatement sur les premiers liens obtenus et prenez le temps de lire leurs brefs descriptifs — sur deux ou trois pages, disons — avant de choisir où vous irez.
- En ouvrant un lien, faites simultanément une recherche sur ce qu’on dit à propos de ce lien, de cette source : c’est parfois très instructif et cela pourra vous éviter de tomber dans un piège.
- En recherchant de l’information sur un sujet, allez sur Wikipédia… mais pour lire ce qu’on dit de ce sujet dans les commentaires de la page en question!
Et surtout, surtout, passionnez-vous !