Au courant de l’été 2021, Kim était en congé de maternité pour la 4e fois. Elle se demandait comment briser l’isolement que les mères peuvent parfois ressentir dans les premiers mois de vie de leur bébé lorsqu’elle a entendu parler de Trois-Rivières récolte. Elle s’est alors inscrite comme citoyenne-cueilleuse et a participé à ses premières activités de glanage avec sa petite Évelyne de 3 mois.
« Je trouvais ça génial de pouvoir intégrer ma fille à une activité sans me sentir mal. Les autres bénévoles ne s’offusquaient pas si j’interrompais ma récolte pour donner un biberon, et je pouvais même leur confier ma fille pour avoir un petit répit. Je me suis rapidement fait des amies ! », se souvient-elle.
« En plus, ça me permettait de rapporter de la nourriture à la maison. Quand on ne vit pas avec son plein salaire, on doit redoubler d’imagination pour économiser. Le glanage, c’est extraordinaire pour ça ! Puis, c’était important pour moi de montrer à mes enfants que leur maman aussi rapporte quelque chose à la maison, même si ce n’est pas sous forme d’argent. Il y a toutes sortes de façon de contribuer dans un ménage. »
Kim a étudié le droit et travaillé pendant de nombreuses années à Montréal, rivée à un ordinateur. Après la naissance de leur premier enfant, son conjoint et elle ont décidé de troquer la métropole pour la Mauricie. Trois autres grossesses plus tard, Kim n’avait pas envie de reprendre un rythme de travail effréné. Cette citoyenne engagée rêvait d’un emploi riche de sens.
« À travers les activités de Trois-Rivières Récolte, j’avais rencontré Marie-Michelle Savard, la chargée de récolte. Elle m’a demandé ce que je comptais faire lorsqu’Évelyne rentrerait à la garderie. Ça n’en a pas pris plus que ça pour que j’envoie mon CV et que je devienne moi aussi chargée de récolte » raconte-t-elle. « Je n’aurais pas pu demander mieux en termes de conciliation travail-famille et de valorisation. »
Kim a donc son salaire de chargée de récolte, en plus de rapporter une quantité impressionnante de fruits et de légumes à la maison. « Quatre enfants, ça mange ! En fin de saison, je me trouve chanceuse et je suis fière de regarder mon congélateur rempli de compote faite maison : j’en ai pour le restant de l’année scolaire. »
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Ce que Kim n’avait pas prévu, c’est qu’elle entrerait dans tout un écosystème entourant la sécurité alimentaire. En allant mener des aliments frais et locaux aux organismes communautaires trifluviens, elle a découvert tous les services que ceux-ci offrent à la population. « La Maison des grands-parents, par exemple, est à 100 mètres de chez moi. Elle organise bientôt une activité de cannage et je compte bien y participer. »
Kim donne aussi de son temps à la Maison de la famille. Elle y constate que le visage de la pauvreté a changé au Québec. Les personnes dans le besoin ne sont pas nécessairement sans emploi. Un événement imprévu peut faire en sorte qu’on ait recours à de l’aide alimentaire. Une fois qu’on a repris le dessus grâce aux banques alimentaires, on peut se tourner vers le glanage, les groupes d’achat ou les cuisines collectives, par exemple, pour renforcer notre sécurité alimentaire. Mais pour cela, encore faut-il acquérir les connaissances et habiletés nécessaires pour cuisiner. À cet effet, les chargées de récolte se donnent la mission de partager des trucs et des recettes et des modes de conservation pour pouvoir profiter des récoltes tout au long de l’année et réduire davantage le gaspillage alimentaire. Plusieurs bénévoles contribuent également à ce partage.
Kim retournerait-elle travailler en droit ? « Je me suis toujours sentie imposteur dans la vie. En droit, il n’y a pas de place à l’erreur. Avec Trois-Rivières Récolte, je n’ai jamais été aussi bien accueillie dans mes imperfections. Et surtout, je me couche le soir en ayant la certitude qu’on a fait une différence dans la vie des gens. »
Trois-Rivières Récolte fait partie du mouvement Cultive le partage, qui nourrit la Mauricie en valorisant les surplus agricoles.