Les préjugés sont fréquents en matière d’immigration, en particulier envers les femmes. En effet, l’image qui vient souvent à l’esprit dans ce cas est celle d’une femme soumise à son mari et qui sort peu de chez elle. Ainsi, il n’est pas rare d’entendre des commentaires de gens qui craignent que l’immigration n’entraîne un recul de la cause des femmes.
Pourtant, selon Carol-Ann Bilodeau, responsable du comité Harmonisation au Service d’accueil des nouveaux arrivants (SANA) de Trois-Rivières, il existe des modèles très diversifiés de relations homme-femme chez les immigrants arrivant au Québec. « Ça peut très bien être la femme qui va chercher du travail en premier, et l’homme qui reste à la maison, si elle parle déjà le français ou est plus éduquée que lui, par exemple », explique-t-elle. Le comité Harmonisation permet justement aux nouvelles arrivantes de se familiariser avec les codes de vie du Québec. Un après-midi par mois, une vingtaine de femmes de toutes origines, y compris québécoise, se réunissent pour échanger autour d’une activité. Sortie, création artistique, tricot, etc., l’espace informel est là pour susciter l’échange sur les réalités de chacune. Les femmes peuvent ainsi exprimer leurs craintes, leurs incompréhensions et recevoir l’expérience de celles qui sont arrivées depuis plus longtemps ou qui sont nées ici. « C’est un moyen d’apprendre à prendre sa place en tant que femme », ajoute Carol-Ann Bilodeau. Elle résume ainsi le but du comité : « On veut les amener à découvrir les ressources disponibles à Trois-Rivières, comme la Ressource Faire (Familles d’appui et intervention pour un réseau d’entraide), la Maison des grands-parents, la bibliothèque municipale. On veut également développer l’indépendance des femmes en leur montrant comment prendre l’autobus pour se déplacer de façon autonome, par exemple en organisant un rallye où elles doivent ramener des photos de différents lieux à Trois-Rivières. Les activités visent à développer la confiance en soi et l’autonomie, rencontrer des gens, se faire un réseau d’entraide, parler français et prendre un moment pour soi. »
Les femmes immigrantes participant à ce comité manifestent le désir de mieux comprendre la culture de la société qui les accueille. Il n’est toutefois pas facile d’aller vers les autres lorsqu’on n’est pas encore à l’aise avec les codes socioculturels d’un nouveau milieu de vie. Ce ne sont pas juste les gens d’origine québécoises qui sont craintifs. « Il y a une crainte de la rencontre de part et d’autre, une peur de ne pas bien maîtriser les codes. La personne immigrante peut ressentir les mêmes inquiétudes que nous lorsqu’elle va rencontrer les gens : la peur de choquer parce qu’elle ne saluera pas correctement, par exemple », dit Carol-Ann Bilodeau.
La clé est là ! Briser cette peur de l’autre qu’on ne connaît pas. Favoriser les occasions de mieux comprendre les codes en permettant les rencontres. Car on attribue trop souvent la tâche de l’intégration aux nouveaux arrivants. On oublie que l’immigration est une richesse pour notre société et que nous avons la responsabilité de nous montrer accueillants, curieux de l’autre dans toutes ses fascinantes différences. Pour commencer, pourquoi ne pas participer à une activité du comité Harmonisation, où le plaisir semble toujours au rendez-vous ? Pourquoi ne pas tendre la main à notre nouvelle voisine immigrante ? Elle a sans doute bien des questions sur la vie dans son nouveau pays…