Lynne Champoux-William, avril 2016
Naomi Klein, journaliste canadienne, reporter au Rolling Stone et chroniqueuse affiliée notamment au New York Times et au Guardian, est l’auteure de No Logo – La tyrannie des marques (2001), Journal d’une combattante – Nouvelles du front de la mondialisation (2003) et La stratégie du choc – La montée d’un capitalisme de désastre (2008). Elle signe ici le premier ouvrage dans lequel elle traite de l’impact de l’économie sur l’environnement. Pour l’essentiel, Klein y explique pourquoi elle estime que la crise climatique ne peut se régler dans une économie néolibérale de libre marché.
Après avoir exposé dans l’avant-propos le cheminement qui l’a menée à rédiger ce livre, l’auteure entre sans autre cérémonie dans le vif du sujet. Dans la première partie, elle décrit les motivations des climatosceptiques, ceux qui ne croient pas que l’humain est responsable du réchauffement climatique et que ce dernier menace son avenir et illustre l’échec des négociations climatiques onusiennes des trente dernières années. Klein enchaîne ensuite avec sa spécialité, le commerce et son interaction avec le climat, se plait à imaginer un passé où Obama aurait respecté ses promesses environnementales et nous rappelle que « l’extractivisme », soit l’exploitation industrielle des ressources naturelles non renouvelables, trouve sa racine au XVIIe siècle dans l’apparition de la machine à vapeur fonctionnant au charbon et sa promesse de permettre à l’humain de s’affranchir des contraintes de la nature pour mieux la dominer. Klein conclut par une attaque en règle contre l’austérité, qui non seulement s’oppose à l’engagement des dépenses urgentes qu’exigent les événements météorologiques extrêmes et le développement des énergies renouvelables, mais pousse des retraités grecs et italiens au suicide.
Dans la deuxième partie, où elle fait le tour des solutions stériles proposées jusqu’à maintenant, l’auteure oppose les organisations non gouvernementales (ONG) telles que le World Wildlife Fund et le Sierra Club, qui entretiennent des liens avec les entreprises comme Shell, Wal-Mart, Monsanto et Toyota, aux ONG indépendantes tels les Amis de la Terre, Greenpeace et 350.org. Klein dénonce ensuite les promesses environnementales non tenues du PDG milliardaire de Virgin et les investissements pour trouver une solution facile de Bill Gates, pour conclure en décrivant une rencontre de géoingénieurs qui, à l’instar des savants du film La Matrice, proposent de diminuer le rayonnement solaire en reproduisant artificiellement l’action naturelle des volcans, ce qui entraînerait des sécheresses ailleurs dans le monde.
La troisième partie de l’ouvrage est consacrée aux solutions à la crise actuelle, comme la « Blocadie » (résistance anti-extraction), le désinvestissement du secteur des combustibles fossiles, l’interdiction de l’extraction, les poursuites judiciaires en vertu du droit autochtone et le mouvement des villes en transition.
Ce livre est issu d’un excellent journalisme d’enquête. Il s’adresse à un lectorat très éduqué et féru d’actualité. Sa lecture requiert donc que l’on s’y attarde.
En conclusion, je vous invite à voir le film inspiré du livre qui sera diffusé le 7 avril à 19h30 au Ciné-Campus.
* Tout peut changer : capitalisme et changements climatiques, Naomi Klein, Montréal, Luxe Éditeur, 2015, 596 pages.