Du 28 octobre au 20 novembre 2022, l’exposition Vues du dedans de l’artiste Lorraine Beaulieu est présentée à la magnifique petite Place des Arts à Saint-Mathieu-du-Parc. Une fois le pied posé dans la salle d’exposition, on ne peut que voir la vie en bleu.
Il faut dire que La petite Place des Arts est une œuvre d’art en soi. Reconvertie en espace partagé par Suzanne Guillemette, la salle d’exposition Desjardins au rez-de-chaussée inspire la contemplation. Et l’exposition de l’artiste Lorraine Beaulieu s’y insère tout naturellement.
Un parcours artistique inspiré
Beaulieu est une artiste influente de la région, en plus d’avoir été responsable de la Galerie R3 de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) pendant près de sept ans. En 2007, elle a vécu une résidence d’artiste en Antarctique ayant influencé sa démarche. Ce séjour l’aurait notamment inspirée à utiliser le médium photographique du cyanotype dans ses œuvres, étant donné que « l’Antarctique est le continent où le rayonnement ultraviolet est le plus intense ».
Vues du dedans est une collection d’œuvres de Beaulieu, créées au fil du temps. Le fil conducteur est une évidence ; l’eau, l’écosystème, l’environnement, mais aussi la présence du corps humain.
Cette eau qu’on oublie
En parcourant la salle d’exposition, il est difficile de ne pas se laisser toucher par la sensibilité de Beaulieu face à l’environnement, non pas comme un espace distinct et étranger mais comme un territoire qui serait l’extension de nos propres corps.
À gauche, deux fenêtres de la salle ont été obstruées par des grandes toiles et des silhouettes de corps au cyanotype affichées sur de longues toiles au mur évoquent des corps endormis au sein de l’eau, l’eau comme un lit douillet que l’on ne veut pas quitter. Le visiteur ou la visiteuse est ainsi face à cette eau qu’on oublie, elle qui pourtant constitue 72% de la surface de la planète et 65% du corps humain.
Près du centre de la pièce est posée au sol une chaîne d’extrémités de bouteilles de plastique collées ensemble. Selon le regard, on pense à des bouées ou bien à un collier de perles. À la fois l’urgence et la beauté. L’artiste n’avait pas pu se résoudre à jeter toutes ces bouteilles que sa mère avait dû acheter lors de la crise d’eau potable à Shawinigan il y a quelques mois.
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Désosser les parapluies
Les Sagradas, série d’œuvres réutilisant l’une des silhouettes au cyanotype, explore cette forme humaine en cinq exemplaires. L’une présente deux mains ensanglantées apposées sur la poitrine. Une autre voit sa gorge et son visage grugés par des volutes bleues comme des ronces qui prendraient possession d’un bâtiment abandonné.
Chaque œuvre parle à sa propre manière ; elles chuchotent, gloussent ou gémissent, mais elles discutent toutes entre elles. En visitant cette exposition, on se plonge sous l’eau dans des urgences bleues mais aussi des douceurs. Comme ces parapluies désossés avec, sur chaque panneau triangulaire, un élément visuel rappelant chaque étape du cycle naturel. Objets utilisés pour se protéger du climat, cette fois les parapluies ne peuvent rien contre la nature. Aussi bien se laisser submerger.