Alex Dorval – Élections fédérales – septembre 2021 Hier soir 7 septembre se tenait le débat des candidats aux élections fédérales de Trois-Rivières, organisé conjointement par La Gazette de la Mauricie, Environnement Mauricie, Fondation Trois-Rivières durable, Roulons Vert et l’hôte de l’événement, le Collège Laflèche. Près de 250 personnes ont suivi le débat en direct en webdiffusion en plus des 75 personnes qui étaient sur place dans l’auditorium où la distanciation et le port du masque étaient de mise.
Bien que les organisateurs aient lancé l’invitation aux cinq candidats de la circonscription, seulement trois sur cinq ont répondu à l’appel. Les candidats Adis Simidzija (NPD), Martin Francoeur (PLC) et René Villemure (BQ) étaient présents pour répondre aux question de l’animatrice et chef d’antenne à Radio-Canada Mauricie, Sarah Désilets-Rousseau. Pendant une heure, les candidats auront eu à faire valoir leur position autour de cinq grands thèmes environnementaux et régionaux : 1) l’adaptation aux changements climatiques, 2) la gestion de l’eau 3) la protection des milieux naturels, 4) la gestion des matières résiduelles, et finalement, 5) la transition vers une agriculture durable. Dès le premier tour de table, les candidats ont convenu de la primauté des enjeux reliés aux changements climatiques. Cela semble aller de soi, mais comme le faisait remarquer certains analystes à la fin du débat, la chaise vide du Parti conservateur nous rappelle que la lumière de la science climatique n’éclaire pas tous les candidats avec le même éclat.
Pointes critiques
De façon générale, le débat s’est déroulé dans le calme, chaque candidat prenant la parole à tour de rôle pour présenter ses engagements pour Trois-Rivières et parfois ceux de leur parti à l’échelle du pays. Dès la première joute oratoire, M. Simidzija aura toutefois lancé une première pointe critique à l’endroit du candidat Villemure et du Bloc Québécois, rappelant les récents propos de son chef Yves-François Blanchet disant croire que le 3ième lien puisse se construire de façon écologique. Les nombreuses pointes de M. Simidzija étaient-elles trop nombreuses ? Les analystes ne semblaient pas tous d’accord sur ce point, certains y voyant une forme de « bullying », d’autres, une opportunité de se démarquer ou une simple tentative de rendre le débat plus vivant.
Engagements pour Trois-Rivières
Les candidats ont été invité lors des questions du public à nommer leurs trois engagements prioritaires pour Trois-Rivières. Martin Francoeur – Parti Libéral du Canada
- Modifier les comportements individuels et collectifs à l’égard de l’environnement et de la lutte aux changements climatiques
- Soutenir le pôle industriel des technologies propres avec IDETR
- Investir dans la transition de projet d’autobus à l’hydrogène de la STTR
Parmi les autres engagements notables, les libéraux proposent de pérenniser l’aide aux municipalités de la région afin de leur permettre de compléter la réfection des infrastructures de gestion des eaux usées et de s’attaquer de façon définitive au fléau des déversements. Le parti promet également la création d’une Agence nationale de l’eau. Point faible : Certes, les annonces d’investissements du parti semblent massifs – (on a souvent parlé de milliards), mais la volonté affirmée des libéraux de concilier économie et environnement semble souvent aboutir à un discours d’écoblanchiment. Toutes les solutions passent par des « investissements majeurs » et le « soutien de l’industrie et des technologies vertes » qui assurerait nous dit-il, une « transition verte ». Jamais le productivisme n’est remis en question, ce que le candidat du NPD et quelques analystes ont déploré. René Villemure – Bloc québécois
- Lutter contre l’érosion des berges du St-Laurent et du St-Mauricie
- Financer les technologies vertes et créer des emplois dans ce domaine
- Investir dans l’aluminium (même si ce n’est pas directement dans la région, « c’est proche »)
La proposition la plus forte du candidat bloquiste est sans doute de vouloir enquêter sur un fort soupçon de « copinage » entre les lobbyistes des compagnies de pesticides et Santé Canada. Contrairement au candidat libéral, le parti n’hésite pas à parler de « contraindre l’industrie » et à s’engager dans une « lutte » contre les changements climatiques. Point faible : Si M. Villemure aimerait que le Canada reconnaisse que la protection des milieux naturels et ressources naturelles est de souveraineté québécoise, il semble vite empreint à recycler cet argument de non-ingérence pour éviter de prendre position dans les dossiers municipaux. « Idéologue » ? Peut-être, ou serait-ce un cas classique de politique de la patate chaude ? Adis Simidzija – Nouveau parti démocrate
- Créer des jardins communautaires pour modifier les comportements individuels et collectifs
- Électrifier les transports en commun, améliorer la fréquence de service et instaurer la gratuité du transport en commun
- Créer un comité pour lutter contre le gaspillage alimentaire et viser la souveraineté alimentaire
M. Simidzija est le seul candidat qui aura osé parler de « décroissance ». L’analyste Stéphanie Dufresne notait à cet égard que la France présente deux partis prônant la décroissance aux prochaines élections et qu’il y a fort à parier que les partis canadiens emboiteront le pas dans les prochaines années. En matière de réduction de GES, le NPD s’engage conséquemment à mettre fin aux subventions aux pétrolières. Point faible : La proposition de création de jardins communautaires, pour être intéressante, aurait gagné à être mieux explicitée. « Modifier les comportements individuels et collectifs » et « viser la souveraineté alimentaire » sont assurément des objectifs louables, mais on reste en surface ici. Peut-être que M. Simidzija aurait fait meilleur usage de son temps de parole à détailler ses idées plutôt qu’à s’acharner sur son adversaire bloquiste. Quelques piques hors-propos ont semblé simplement faire mouche.
À défaut d’interpréter l’absence des candidats conservateur (Yves Lévesque) et vert (Andrew Holman) comme preuve d’un je-m’en-foutisme face à l’urgence climatique, les analystes ont soulevé d’une part, l’ironie de l’absence du candidat vert et la frilosité de celle du candidat conservateur. La plateforme du Parti vert du Canada est sortie le matin même, cela suffirait-il à expliquer le désistement de M. Holman ? M. Lévesque pour sa part n’est pas reconnu pour sa frilosité politique : l’environnement serait-il sa bête noire ? Ou peut-être est-ce celle des conservateurs qui ont craint de voir leur combatif candidat s’embourber dans un dossier où l’argumentaire basé sur la science prône sur la pugnacité. Difficile de dire à ce stade-ci à qui ira le vote vert. Même les analystes Robert Aubin (ex-député pour le NPD) et Stéphanie Dufresne (ex-candidate au Parti vert) semblaient ne pas avoir arrêté leur choix sur un candidat. Peut-être que le débat des chefs de ce soir permettra à chacun de mieux éclairer sa lanterne.