La question climatique occupe désormais le premier plan des préoccupations citoyennes. Le 15 mars prochain seront organisées des grèves écolières et des marches pour le climat un peu partout au Québec et dans plusieurs villes du monde. Pour les écoféministes, les luttes écologiste et féministe sont liées puisqu’elles sont toutes deux issues d’un cadre conceptuel désuet dont on doit se libérer : celui de la domination.

L’écoféminisme

Mouvement politique qui a émergé dans les années 70 autour des enjeux environnementaux du nucléaire, l’écoféminisme a repris ces derniers temps une vitalité revendicatrice. Il s’agit d’une branche du féminisme que l’on relie à la lutte écologiste en faisant un parallèle entre l’exploitation et la destruction de la nature, et les différentes formes d’oppression des femmes. L’écoféminisme est très diversifié et adopte une pluralité de positions, mais sa pierre angulaire est de faire valoir la façon dont la logique de domination a servi historiquement au système économique capitaliste et au patriarcat pour asservir, dans un même élan, les femmes et la nature.

Une convergence des luttes

L’essor du modèle industriel de production, basé sur les énergies fossiles, s’est fondé sur une conception mécaniste des sciences, dans laquelle on instrumentalise la nature et les écosystèmes. Encore aujourd’hui, dans le débat public, les solutions envisagées pour lutter contre la crise environnementale et le changement climatique sont souvent technologiques et scientifiques, et ne visent pas à transformer les idéologies d’exploitation et de colonialisme. Comme l’écrivait Naomi Klein dans son livre Tout peut changer : Capitalisme et changement climatique, « il est toujours plus facile de nier la réalité que d’abandonner notre vision du monde ».

Adoptant une approche radicalement différente, l’écoféminisme cherche plutôt à repenser l’ensemble de notre culture et à créer des formes non dominantes d’organisation sociale et d’interaction entre la nature et l’humain. Pour la philosophe Émilie Hache, l’écoféminisme se traduit en geste par le reclaim, un terme emprunté à l’écologie et volontairement non traduit, qui veut dire régénérer ou réhabiliter. Il vise à se réapproprier aussi bien l’idée de notre interdépendance avec la nature que ce qui relève de la féminité. Il s’agit, entre autres, de revaloriser dans l’espace public l’ensemble des attributs qui ont été historiquement associés aux femmes (le partage, le soin, l’empathie, l’émotivité, etc.). Or, ces caractéristiques ne relèvent pas par essence du genre féminin et elles doivent s’appliquer à toute l’humanité afin de l’emporter sur l’individualisme et la compétition.

La lutte pour le climat nécessite d’intégrer une vision holistique du monde, de comprendre nos interrelations avec la nature et d’adopter des rapports non dominateurs envers elle. De tout temps, la lutte féministe cherche à modifier les mentalités qui nourrissent et justifient les oppressions, afin de faire changer les normes sociales. En agissant à la fois sur les fronts de la justice sociale et de l’environnement, le rôle des écoféministes dans la révolution sociétale à venir ne sera sans doute pas marginal.


Larrère, Catherine. « L’écoféminisme : féminisme écologique ou écologie féministe », Tracés. Revue de sciences humaines 22/2012. Violynea et Natty. (2017). « Expliquez-moi l’écoféminisme »

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